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esprit libre

[à l'université]
 
 
 
Une rentrée placée sous le signe des classements universitaires !

Après avoir rendu hommage aux membres récemment disparus de la communauté universitaire, le président du Conseil d'administration, Jean-Louis Vanherweghem cédait immédiatement la parole, université participative oblige, à Jonathan Brauner, représentant étudiant au CA. Endossant un tablier d'étudiant en médecine, celui-ci donnait immédiatement le ton de son discours truffé d'une sémantique toute médicale. Dénonçant les taux d'échec, Jonathan Brauner préconisait la promotion de la réussite et l'amélioration de l'enseignement ; ajoutant que si le recteur avait mis au point des initiatives intéressantes à cet égard, " trop souvent les termes " innovation " et " pédagogie " engendraient convulsions et poussées de fièvre " chez certains enseignants.

Une ULB sociale

Il est pourtant clair, ajoutait-il qu'un traitement de fond est nécessaire afin de garantir que l'Université remplisse son rôle pour que chacun puisse entamer une formation universitaire dans les meilleures conditions possibles. Et de saluer la politique sociale menée par l'ULB pour améliorer la condition des étudiants les moins favorisés.
Jonathan Brauner a ensuite fustigé les rankings et le processus de " décomposition " de Bologne, visant " à créer une compétitivité importante entre les universités européennes ". Après avoir dénoncé le numerus clausus et appelé à la destruction pure et simple du système de contingentement des professions médicales, l'étudiant a lancé un appel à un refinancement de l'enseignement universitaire. Avant de conclure sur le caractère unique de notre Université, " la seule université de la Communauté française à faire du libre examen son principe fondateur " dont on attend " qu'elle affirme son utopie ".

Approfondir la gestion participative

Luc Massaer, s'exprimant au nom du corps scientifique et du personnel (PATGs) a ensuite rappelé l'héritage de mai 68 et les atouts d'une gestion participative et représentative. Si l'Université a, selon lui, gagné en démocratie, cet acquis se doit d'être approfondi vu le déséquilibre de la représentation des différents corps de l'Université au Conseil d'administration. Et de déplorer que si l'ensemble des membres de la communauté universitaire peuvent s'exprimer au Conseil d'administration, il n'en va pas de même au sein des Conseils d'Académie. Si les étudiants y occupent 20% des sièges, les autres délégations des corps académique, scientifique et PATGs n'y sont pas représentées individuellement, même si l'ULB a établi une tournante qui permet à chacun des corps d'y être représenté tour à tour.

Toujours dans un registre médicastre, Le président Jean-Louis Vanherweghem jetait quant à lui un large regard sur l'année écoulée avec sa verve coutumière, provoquant rires et sourires dans l'assemblée. Il rappelait tout d'abord " l'affaire des trois points " (vente de terrains à la Plaine, carte multifonction, appel au marché financier pour financer les rénovations des cités étudiantes) qui a saisi le campus du Solbosch de " convulsions " à l'automne dernier pour aboutir tous trois a une issue favorable en cours d'année académique. Comme disait Archibald de Haddock, soulignait ce tinitinophile averti, " tout est bien qui finit bien ".

Retour à l'équilibre financier

Le président se félicitait ensuite du retour à l'équilibre financier obtenu notamment grâce à l'augmentation de notre recrutement étudiant, à une défiscalisation des salaires des chercheurs et assistants et à un recentrage de l'Université sur ses missions essentielles. Dans le même temps, les cadres académiques étaient augmentés et un complément de budget était voté pour promouvoir la réussite des étudiants de première année. Et, dans le cadre du Plan langues, l'ULB continuait à offrir à 3500 étudiants la possibilité de suivre gratuitement des cours de mise à niveau en anglais et néerlandais.

Jean-Louis Vanherweghem invitait ensuite l'assistance à une promenade sur les campus pour découvrir les grands travaux prioritaires qui seront réalisés grâce aux 50 millions d'euros de la vente des terrains à la Plaine. Il mettait ensuite en exergue une série de nouveaux masters mis en place dans le cadre de cette rentrée (voir Esprit libre de juin 2007) avant de souligner l'excellence de notre recherche. À titre d'exemple, François Fuks qui a reçu le Young investigation Award 2006 de l'organisation européenne pour la biologie moléculaire pour ses travaux dans le domaine de l'épigénétique, Nicolas Cerf qui a reçu le Marie Curie Excellence Award 2006 pour ses travaux dans la théorie de l'information quantique et Davy Paindaveine couronné par le Junior Scholar Award 2007 de l'American Statistical Association pour ses travaux dans le domaine de l'analyse statistique. Sans parler des publications de nos équipes de recherche dans les revues scientifiques les plus prestigieuses et des prix décrochés par nos étudiants de Solvay, de droit international, de sciences politiques et de bioingénieur.
Le président a modéré quelque peu son propos en rappelant que ces signes d'excellence n'étaient que " quelques étincelles par rapport au brasier des universités des États-Unis truffées de prix Nobel ". En faisant la corrélation immédiate avec notre financement : " là où nous alignons difficilement 60 à 70 M d'euros pour la recherche, l'université américaine d'excellence aligne 1 à 2 milliards de dollars. "

Prendre position

Dans la sphère des relations internationales, a souligné Jean-Louis Vanherweghem, l'ULB a resserré ses liens avec les universités canadiennes et signé une convention de collaboration avec l'Université de Berkeley. Une convention a été conclue avec le Collège de France afin de créer à Bruxelles une chaire d'accueil des professeurs de cette institution, en partenariat avec les autres universités de la Communauté française.

Côté anniversaire, le président a rappelé les 70 ans de présence en Afrique centrale du Cemubac, les premiers diplômés du programme européen de micro-finance de la SBS, les 25 ans du Fonds Erasme et les 30 ans de l'Hôpital Erasme, ce 1er octobre. Le président terminait son discours sur les valeurs rappelant la grande réflexion initiée par le recteur sur les valeurs fondatrices de l'ULB et des remous provoqués par l'affaire " Ramadan " en concluant que l'Université dite du " libre examen " devra se positionner sur les valeurs fondatrices de la laïcité face aux interférences du religieux dans la vie civile. Et d'appeler le recteur à poursuivre ce " travail ambitieux … mais périlleux ", avant de lui céder la parole.

Les rankings dénoncés

Le recteur a dénoncé, dans sa leçon de rentrée, la méthodologie des classements d'universités, les fameux " rankings ", nés de la concurrence croissante entre universités. En se penchant plus spécifiquement sur ceux de Shanghai et du Times, Philippe Vincke a largement démonté tant les conditions dans lesquelles ces classements se font (notamment l'absence de compétence déclarée de ceux qui les réalisent) que les critères utilisés ou encore la fiabilité des données. À titre d'exemple, " Aucune évaluation sérieuse de la qualité de l'enseignement n'est réalisée " a-t-il souligné. En outre, le biais de certaines disciplines est très fort : Shanghai ne réserve par exemple aucune place à une série de disciplines de sciences humaines. La taille d'une université, le nombre de signataires d'un article scientifique, ont un impact sur le classement. Aucune mention d'écart-type et de marge d'erreur n'est faite alors que la simple erreur matérielle d'encodage est estimée scientifiquement à près de 30%. Et elles ne sont pas rares comme les recherches de l'Hôpital Erasme attribuées à l'Université Ersamus de Rotterdam et les biais induits par les diverses traductions d'ULB en anglais ou par les adresses différentes de nos campus...

Et le recteur d'asséner que la qualité globale d'une université est trop complexe pour se limiter à un chiffre. Après avoir mis en évidence le caractère non scientifique des rankings qui font la Une des journaux, Philippe Vincke concluait sur la nécessité pour les pouvoirs publics et les universités elles-mêmes de se saisir de la problématique et de la traiter avec la rigueur indispensable.

A la fin de la séance, un moment d'émotion : brandissant des flambeaux, les cercles étudiants hauts en couleurs descendaient du haut de l'auditoire pour rejoindre, devant l'estrade, les Chœurs de l'ULB, rappelant par leur présence chaleureuse la raison d'être de notre Alma Mater. Une Alma mater dont la 174e rentrée s'est clôturée comme chaque année par un vibrant Semeur mené par les Chœurs et repris avec des bonheurs variés par toute l'assemblée enthousiaste et debout.

Isabelle Pollet


Le 21 septembre dernier, sous un soleil éclatant, se pressait une foule compacte et animée vers l'amphithéâtre Paul-Emile Janson pour assister à la traditionnelle rentrée académique de l'Université. Dans les premiers rangs, on pouvait reconnaître, entre autres, Elio di Rupo, Françoise Dupuis, Armand De Decker, Hervé Hasquin, Philippe Busquin et Paul Magnette prenant place avant l'arrivée du cortège des autorités universitaires.



 
  ESPRIT LIBRE > NOVEMBRE 2007 [ n°53 ]
Université libre de Bruxelles