Etude de matériel

Les conditions géo-climatiques particulières dont bénéficie la côte centrale du Pérou permettent une exceptionnelle conservation de tous les types de matériel archéologique (céramique, bois, textiles, restes humains, paléofaune, restes végétaux, métaux, etc.). Les quantités récoltées au cours de chacune des campagnes sont très importantes. Les différents matériels sont confiés à des spécialistes péruviens et étrangers :

Etude de la céramique : Dr Peter Eeckhout (ULB) et Dr Jane Feltham (University of Liverpool)


moule pour figurine en céramique
découvert dans la Pyramide n°3 (campagne 2000-2001)

paire de vases de style
Chimu-Inca local
(campagne 1999)

Etudes anthropohysiques : Dr Lawrence Owens (University of London)

Echos du passé: les restes humains à Pachacamac
«  Bien qu'elles puissent être souvent et à juste titre superbes et fascinantes, les choses auxquelles nous pensons comme représentant “l'archéologie” –qu'il s'agisse de bâtiments, de céramiques ou de textiles- peuvent aussi apparaître quelque peu statiques, ou isolées de leurs créateurs. Que ressentiriez-vous si votre vie était évaluée seulement en fonction de l'allure de votre maison, du contenu de vos poubelles, de la voiture que vous conduisez ou du style de votre vaisselle de cuisine ? Les ossements, par contre, permettent de savoir exactement comment les gens vivaient, ce qu'ils mangeaient, les maladies dont ils souffraient, la cause de leur mort, leurs origines biologiques, voire même comment s'est passée leur enfance. Je pense qu'il y a quelque chose d'incroyable dans le fait de pouvoir se glisser ainsi dans la vie d'individus morts depuis longtemps, et j'ai toujours considéré comme un grand privilège d'être capable de le faire.

A Pachacamac des milliers d'ossements et de fragments éparpillés témoignent de la regrettable popularité de la pratique du pillage de tombes. Nous avons cependant aussi fouillé une série de momies intactes qui nous permettent d'approcher des aspects précis de l'ancienne société péruvienne autant que des « grandes questions » comme l'impact humain de l'urbanisme, l'évolution du rôle de la femme, ou le développement des maladies modernes. Des individus-des nouveaux nés aux très âgés- ont été mis au jour et nous savons, grâce au mobilier funéraire, que toutes les couches de la société étaient représentées, des plus humbles aux mieux nantis. L'analyse en est encore à ses débuts, mais nous avons déjà des idées assez claires à propos des gens qui vivaient ici. Nous savons que la plupart d'entre eux sont décédés avant d'atteindre l'âge adulte, et que ceux qui l'ont atteint n'ont généralement pas dépassé les 40 ans. Ils étaient de corpulence réduite, bénéficiaient d'un régime varié, et semblent avoir joui d'une qualité de vie généralement saine. Néanmoins, on observe également des traces de maladies comme la syphillis, l'arthrite et le rachitisme, ainsi que des indices montrant que certains individus ont subi des déformations crâniennes dans leur enfance, ou même ont été enterrés vivants…  »
Lawrence S. Owens


momie E20, Temple du Singe
(campagne 2000-2001)

momie d'enfant enterré vivant
(campagne 2004)

Etude de la paléoictyofaune : Dr Philippe Béarez (Museum d'Histoire Naturelle, Paris) http://www.ifeanet.org/publicaciones/articulo.php?1314

Etude malacologique : Manuel Gorriti (Universidad Nacional Mayor de San Marcos, Lima) http://www.ifeanet.org/publicaciones/articulo.php?1314

Etude des textiles : Dr Jane Feltham (University of Liverpool)

Vêtements des vivants ...et des morts : les textiles de Pachacamac
«  Le textile était au coeur de l'ancienne société péruvienne, dont les membres passaient une bonne partie de leur temps à filer et à tisser, non seulement pour l'usage quotidien, mais aussi pour embellir les linceuls de leurs morts. Ce que nous savons de leurs talents en ces matières provient d'abord de ces paquets funéraires, sortes d'emballages de leurs momies, préservées avec leur mobilier grâce aux conditions arides de la côte du Pérou. Force est cependant de constater qu'à Pachacamac la plupart des tombes ont été pillées et leur contenu volé. Les violeurs de sépultures n'ont laissé derrière eux que des lambeaux de linceuls, mais ceux-ci suffisent à nous donner une certaine idée de l'habillement côtier et montagnard à l'époque de la conquête espagnole. En dépit des pillages, le Projet Ychsma a mis au jour des tuniques masculines unies en coton et en laine de camélidé. Nous avons également découvert une tunique féminine complète avec son plastron plissé. Elle était peut-être portée sur une jupe de type sari. Nous avons également un manteau en coton brodé de motifs de pélicans et plusieurs bandeaux de tapisserie aux couleurs chatoyantes ornés du mythique animal lunaire ou de serpents entrelacés. Des fragments d'autres manteaux et de châles montrent des motifs brodés représentant des oiseaux, des poissons et des chats, tous très communs sur la côte du Pérou. La plupart des tissus sont faits de coton ; la laine de camélidé est seulement utilisée occasionnellement pour les broderies ou pour les bandeaux tissés en tapisserie. Des fragments de vêtements datant des débuts de la Colonie ont également été découverts, ce qui est très intéressant car on connaît très peu d'exemples concrets des vêtements quotidiens après la conquête espagnole, à l'exception de ce qui est illustré sur les peintures anciennes et autres images.  »
Dr Jane P. Feltham

 

détail d'un textile
représentant un oiseau
(campagne 2004)
détail d'une coiffe en mosaïque
de plumes représentant
un décapiteur
(campagne 1995)

Datations absolues : Dr Anna Pazdur et Dr Adam Michzinski (Silesian University of Technology,Gliwice)
http://www.ingentaconnect.com/content/arizona/rdc/2003
/2003/00000045/00000001/art00009;jsessionid=e00djfhfcr5gf.victoria

Etude archéobotanique  : Dr Alexandre Chevalier (University of California, Berkeley)

Etude anthracologique : Fanny Moutarde (Université Paris I)

Parallèlement aux fouilles, nous nous sommes attelés à la sériation des briques d'adobe dans l'ensemble du site de Pachacamac. Cette méthode repose sur la constatation du fait que les centaines de milliers de briques qui composent les édifices montrent certaines tendances à changer de forme, d'aspect et de dimensions selon les époques où elles ont été façonnées. Par l'établissement d'un corpus suffisamment représentatif de briques, la définition de formes-types dont l'âge est connu grâce aux contextes de fouilles et l'étude statistique de la récurrence des formes-types selon les bâtiments, il est possible de dater avec une étonnante précision les édifices entre eux, et même les phases de construction successives. La méthode offre de nombreux avantages, entre autres d'être plus rapide et beaucoup moins coûteuse que des fouilles à l'échelle d'un site entier. Elle a été testée avec un certain succès dans les sites monumentaux de Chan Chan et Pacatnamú, sur la Côte nord du Pérou, par diverses équipes américaines. Depuis 1995, nous avons commencé à l'appliquer à la Pyramide n°III, mais il faudrait bien entendu élargir la collecte des données à l'ensemble des bâtiments pour que l'étude envisagée soit possible.