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Kim Oosterlinck est professeur de finance à la Faculté Solvay Brussels School of Economics and Management et chercheur au Centre Emile Bernheim, dont il est le président. Ses recherches portent sur la finance au sens large, les défauts souverains, la finance historique et le marché de l'art. Il a co-écrit avec Marie Brière et Ariane Szafarz (également chercheuses à l’ULB) l'un des premiers articles consacrés au bitcoin du point de vue de l'investisseur. Kim Oosterlinck est par ailleurs Vice-Recteur à la Prospective et au Financement de l'ULB et Research Fellow du prestigieux Centre for Economic Policy Research.


Kim.Oosterlinck@ulb.ac.be

@KimOosterlinck

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Avril 2018 - La bulle du bitcoin explose

Kim Oosterlinck, Centre Emile Bernheim


Kim Oosterlinck, plusieurs journaux ont titré que la chute de la valeur du bitcoin en avril dernier était "la bulle la plus violente de l’histoire". Qu’en pensez-vous?

Au travers de l’histoire, il y a en effet eu plusieurs effondrements subits du prix d’actifs divers, qualifiés de "bulles". L’exemple le plus connu est la bulle des bulbes de tulipes au 17ème siècle, mais il y a aussi eu des bulles autour des actions de chemin de fer, des bicyclettes, de la radio et des télécommunications – ayant contribué à la crise financière de 1929 – etc. Le point commun, c’est qu’il s’agissait à chaque fois d’une innovation technologique pour l’époque. On remarque également que les bulles sont aussi corrélées à l’apparition d’une nouvelle technologie financière. Le bitcoin correspond à ces deux critères, auquel il faut ajouter sa nature volatile. La chute subite des prix du bitcoin début 2018 partage donc certains des critères de bulles connues.


Comment expliquer cette chute subite du cours du bitcoin, alors que sa valeur ne cessait d’augmenter auparavant?

C’est très difficile de définir ce qui provoque subitement la chute d’un actif financier, bitcoin ou autre. Il n’existe pas de théorie claire aujourd’hui. Les attaques et piratages de plusieurs plateformes d’échange de bitcoin ont certainement joué un rôle déclencheur. Il y aura très probablement d’autres bulles liées aux monnaies virtuelles, bitcoin ou autre. Quant à savoir quand... C’est impossible!


Justement, plusieurs autres monnaies virtuelles ont vu le jour: darkcoin, etherium, lightcoin... Sont-elles semblables au bitcoin? Sont-elles intéressantes?

Il existe en effet une grande concurrence dans le secteur des monnaies virtuelles aujourd’hui. Elles sont basées sur le même principe fondateur que celui du bitcoin: elles représentent une valeur d’échange pur, sans produit "physique" derrière. Toutes ne se comportent pas comme le bitcoin et réagissent différemment aux fluctuations du marché: c’est donc un avantage pour les investisseurs qui souhaitent diversifier leur portefeuille d’actifs. En revanche, elles sont toutes soumises aux mêmes risques de fraudes: monnaie non soutenue par une banque centrale, plateforme d’échange frauduleuse, etc. Le secteur des monnaies virtuelles n’est en effet actuellement pas contrôlé.


La question de la législation est l’une des questions centrales pour l’avenir des monnaies virtuelles actuelles, dont le bitcoin...

Oui, car cela pourrait porter un coup dur à l’attractivité du bitcoin, qui est justement de ne pas être contrôlé et ne pas dépendre du marché financier classique – avant de devenir un actif financier à part entière, le bitcoin servait notamment à se procurer des objets illicites ou à blanchir de l’argent, rappelons-le. Plusieurs banques centrales ont déjà manifesté un intérêt envers la technologie blockchain et pourraient vraisemblablement lancer leur propre monnaie virtuelle. Celle-ci aurait l’avantage d’être contrôlée et avalisée par un acteur officiel, contrairement aux autres monnaies virtuelles actuellement en circulation.


La technologie blockchain intéresse donc les acteurs financiers, mais pas seulement...

L’innovation de la technologie blockchain est de garantir les transactions: elles ne peuvent pas être modifiées par des tiers. C’est cette notion d’authenticité, de garantie, qui est novatrice et intéressante. On a ainsi vu des œuvres d’art contenant des codes blockchain associés pour éviter les faux. On peut imaginer aussi que cela intéressera l’industrie du luxe, pour lutter contre les contrefaçons, par exemple. Malheureusement, le blockchain se base sur la résolution d’algorithmes complexes qui nécessitent beaucoup de puissance de calcul. L’énergie nécessaire pour résoudre ces problèmes a été pointée du doigt (les datas centers s’occupant des calculs des bitcoins consommeraient autant d’électricité que 159 pays réunis – NDLR, source : Le Soir). C’est la face sombre de cette nouvelle technologie, et un autre enjeu à résoudre pour voir son usage se répandre dans le futur.

Rappelez-vous

Jeudi 12 avril

Plusieurs journaux titrent sur la chute de valeur du bitcoin: après un pic à presque 20.000$ (USD) en décembre 2017, sa valeur a chuté de 65% en quelques mois.

Crée en 2009, le bitcoin est l’une des premières "crypto-monnaies", ou "monnaies virtuelles". La technologie innovante qui l’accompagne – le protocole blockchain – garantit la sécurité des transactions.

De 2015 à 2018, son cours a été multiplié jusqu’à près de 60 fois. Le 1er novembre 2018, le cours du bitcoin s'élevait à 5597€, soit 6382$. Malgré l’engouement récent, les bitcoins en circulation ne représentent qu’une infime partie des capitaux dans le monde.