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Mathieu Parenti a rejoint l’ULB en 2015, comme Professeur Assistant d’Economie. Chercheur au sein d’ECARES (European Center for Advanced Research in Economics and Statistics), il s’intéresse particulièrement au commerce international et à l’organisation industrielle. Il enseigne plusieurs cours aux étudiants en économie de baccalauréat et de master.


Mathieu.Parenti@ulb.ac.be

@Mathieu_Parenti

Mathieu Parenti a participé au projet "Clichés ! Instantanés de la recherche à l’ULB".

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Octobre 2016 - Non au CETA

Mathieu Parenti, ECARES


En octobre, les parlementaires wallons et bruxellois ont fait de la résistance farouche au traité de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne. Ils évoquaient notamment les tribunaux d’arbitrage, les normes de protection de la santé, la protection des agriculteurs… Leurs attentes ont-elles été entendues?

Pas vraiment. Beaucoup de choses avaient déjà été obtenues avant les protestations wallonnes et bruxelloises, comme l’exclusion du règlement des différends (l’ICS, ce que l’on désigne sous l’appellation "tribunaux d’arbitrage") lors de la période d’application provisoire du CETA. Concrètement cela reste donc un obstacle sérieux à la ratification du traité car l’ICS lui-même est inchangé: ses opposants continuent à critiquer le risque de partialité des futurs juges et aussi la possibilité pour les multinationales d’influencer indirectement les régulations des états en agitant la menace du recours à l’ICS pour obtenir d’importantes compensations financières. On peut donc s’attendre à de nouvelles protestations lors de l’étape de ratification, et pas seulement en Wallonie.

Les Belges ont aussi obtenu une "garantie" sur les normes et le principe de précaution européen (le fait de ne pas mettre un produit sur le marché dès lors qu’il y a un doute sur son impact sur la santé publique, ndlr): l’accord intrabelge prévoit que le CETA n’affectera pas la législation européenne et donc que les normes seraient toujours adaptées à la hausse. Néanmoins, l’interprétation et donc la valeur juridique de cet accord font débat. Ils ont également obtenu une "clause de sauvegarde" en cas de déséquilibre du marché, une manière de protéger le secteur agricole.


Concernant les agriculteurs, la peur tenait surtout à une hausse de la concurrence…

Oui, c’est surtout la crainte que les agriculteurs européens, déjà fragilisés, ne deviennent les perdants du CETA face à un nouvel afflux de concurrents. C’est une peur classique et légitime de tout échange commercial, pas seulement du CETA: tout accord de libéralisation commerciale s’accompagne de gagnants et de perdants. Mais ce n’est pas non plus spécifique des accords commerciaux: les innovations technologiques et l’automatisation peuvent aussi être sources d’inégalités. Il faut donc réfléchir globalement et proposer des politiques d’accompagnement face à la montée des inégalités, quelles que soient leurs origines.


CETA, TTIP, etc. Ces accords à grande échelle sont-ils le seul modèle pour le futur du commerce?

Jusqu’à récemment, les frais de douanes apparaissaient comme l’obstacle principal à l’expansion du commerce international. Aujourd’hui, la plupart des barrières tarifaires, entre par exemple les USA et l’UE, sont déjà à un niveau assez faible (25% des produits importés des USA en UE ne sont même soumis à aucun tarif). On doit donc s’attendre à voir apparaître des accords qui vont se jouer plutôt sur des aspects non purement commerciaux, comme les questions d’investissements, d’harmonisation des normes, etc... Les services aussi deviennent une part importante du commerce mondial: ils devraient continuer à faire l’objet également de nouvelles négociations.


En parallèle à ces accords internationaux, on voit se développer beaucoup d’initiatives à l’échelle locale: le fait de consommer local, de renouer le lien direct avec le producteur, etc. Est-ce que ce n’est pas un signe d’une fracture entre ces deux mondes?

C’est en tout cas une réaction probable à la mondialisation: une attention plus soutenue vis-à-vis de l’environnement, une envie de contrôle plus important de ce que l’on mange, etc. Ce retour au local, n’est cependant pas immunisé contre le commerce international: des acteurs étrangers peuvent aussi s’établir localement pour rencontrer la demande du consommateur, à moindre prix. Je pense que l’on va progressivement atteindre un juste milieu.

Rappelez-vous

Vendredi 28 octobre

Les parlements wallons, bruxellois et de la Fédération Wallonie-Bruxelles, donnent officiellement leur feu vert à la signature du projet de traité de libre-échange entre l’UE et le Canada: le CETA (Comprehensive Economic & Trade Agreement).

Ils mettent ainsi fin à deux semaines de négociations, qui ont mis la Wallonie sous les feux des projecteurs mondiaux: les parlementaires, emmenés par le Ministre Président wallon Paul Magnette, réclamaient depuis plusieurs mois des précisions sur certains points du traité.

L’accord est officiellement signé le 30 octobre entre le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, le Président du Conseil européen, Donald Tusk, et le Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Le CETA devra maintenant être ratifié officiellement par les parlements nationaux et régionaux des pays de l’Union.