Partis faire sécher des tomates au Mali
Quand coopération rime avec pédagogie
Au départ de ce projet de " four de séchage de tomates ", il y a une idée qui germe dans l'esprit d'Antoine Nonclercq. À l'occasion
d'un précédent voyage au Mali, il rencontre, via le CEDID (Centre d'études et d'information sur le développement de l'ULB),
des membres d'une organisation paysanne cultivant notamment la tomate. La problématique de la conservation des tomates dans
ce pays (voir encadré) lui donne l'envie de relever ce challenge. Il planche sur le sujet, imagine tout d'abord de faire sécher
les tomates sur des treillis en bambou, mais l'expérience n'est pas concluante. Revenu en Belgique, il réunit d'emblée d'autres
chercheurs et, à trois, ils conçoivent un projet global qu'ils soumettent à la Faculté, avec l'idée de l'intégrer au cursus
des étudiants. Le doyen, Alain Delchambre, emboite le pas assez vite et l'engouement se poursuit lorsque les étudiants de
4e année sont sollicités : les candidatures se bousculent rapidement (un étudiant sur trois postule !) mais seuls les plus
motivés et ceux ayant déjà une petite expérience en matière de projet sont choisis.
Car l'idée intrigue : " c'était l'occasion de fusionner un projet humanitaire, sans être dans une structure d'ONG, avec le
projet d'étude " explique Laurent. Avec en plus l'opportunité de découvrir le Mali ". " Il y avait, pour ma part, poursuit
Nicolas, la perspective de participer à un projet qui allait durer sur le long terme : un projet que d'autres étudiants devraient
par la suite continuer. Sans oublier l'aspect humain ".
Le projet s'est déroulé en plusieurs phases. Un premier groupe est arrivé sur place de manière à préparer le terrain (trouver
les matières premières, notamment) et l'encadrement (rencontrer les partenaires locaux) ; les étudiants ont ensuite rejoint
le Mali pour concrétiser la construction des fours en trois semaines et enfin, Antoine Nonclercq et Cédric Boey auront rejoint
ceux-ci afin de superviser le travail, aider à résoudre les problèmes et procéder à un premier test.
Système D
L'arrivée des six étudiants leur laisse des émotions encore intenses. Leur arrivée correspondant à une époque d'inondations
qui les ont " mis dans le bain " de la réalité malienne illico, l'eau ayant noyé la centrale électrique, provoquant des coupures
de courant. " Il a aussi fallu s'adapter aux rythmes et aux solutions du type système D proposés par les artisans locaux
et qui ne correspondaient pas vraiment à ce qu'on avait prévu. Leur ingéniosité nous a souvent soufflé ! " explique Laurent.
Par ailleurs, les pièces trouvées sur place ont demandé aux étudiants de revoir leur copie de départ pour s'adapter aux matériaux
à disposition. De quoi sans doute améliorer le prototype initial même si le principe de base reste le bon.
L'échange de techniques et de procédés s'est donc fait dans les deux sens ; c'est également un 'plus' que voulaient les promoteurs
du projet. Sans parler de l'échange en termes de relations humaines : " Nous voulions surtout éviter les écueils d'une coopération
du type 'clé sur porte' où l'on apporte la bonne parole, les pièces et la main d'uvre, ce qui n'a d'intérêt pour personne
finalement ", précise encore Antoine Nonclercq. C'est à présent à Molibemo, l'organisation paysanne qui est partie prenante
du projet, d'en assurer le suivi sur le terrain. Une équipe de l'ULB reviendra en janvier pour tester le matériel finalisé.
S'il est jugé optimal, une première unité globale avec dix fours devrait tourner à l'été 2008, de façon à produire entre 500
et 1000 kg de tomates séchées par jour.
Un projet qui pourrait dès lors faire des petits
Voire déboucher sur de nouvelles coopérations avec de nouveaux partenaires,
ONG ou universités, comme celle de Ouagadougou au Burkina Faso. Le four pourrait donc être adapté à la production d'autres
légumes et utilisé par des personnes formées sur place. À suivre
Alain Dauchot
|
6 étudiants de l'École polytechnique de l'ULB sont partis affronter le soleil du Mali cet été. Le but de leur voyage? Participer
à la dernière phase en date d'un projet mené dans le cadre de la pédagogie par projets de la Faculté des Sciences appliquées
: construire et installer deux fours solaires destinés au séchage des tomates. Parmi les étudiants qui étaient du voyage :
Laurent Lonys, Nicolas Gielis, Benoit Deschamps, encadrés par Antoine Nonclercq (chercheur au Service BEAMS, Faculté des Sciences
appliquées), Cédric Boey (Assistant pédagogique en Polytech) et Benoît Haus (chercheur au Service de Génie chimique, Faculté
des Sciences appliquées). Une expérience marquante et enrichissante... à plus d'un titre.
|
Tomates au Mali: le paradoxe
Au Mali, comme dans d'autres pays d'Afrique, les cultures vivrières sont handicapées par des obstacles techniques concernant
la conservation et le conditionnement du produit. La tomate y est peu cultivée, malgré des conditions d'horticulture favorables.
La chair de tomate en boîte est donc importée... En proposant un procédé de séchage grâce à l'énergie solaire, le projet offre
une perspective de solution assez simple permettant la conservation des tomates dans les meilleures conditions. Ce projet
est réalisé en collaboration avec le CECID (ULB), Ingénieurs sans frontières, ainsi que des partenaires locaux, à savoir :
l'Association des organisations professionnelles paysannes (partenaire agricole), Molibemo (organisation paysanne au sein
de laquelle seront réalisés les fours) et l'Université Mandé Bukari (partenaire commercial).
|