Et pourtant, de manière très concrète, dans la vie d'un enfant handicapé et de sa famille, cette intégration représente beaucoup plus qu'un simple choix d'école : il s'agit d'un choix de vie. Celui-ci influence tant le développement de l'enfant handicapé que celui de ses pairs, de sa classe, de sa famille que de l'équipe pédagogique qui l'accueille. La situation d'intégration ne va pas sans poser un certain nombre de questions mais elle est également porteuse de richesse pour tous.

Intégration

Aujourd'hui, au niveau européen, le problème n'est plus de se demander si l'on doit ou non favoriser l'intégration des élèves handicapés en milieu ordinaire mais bien de savoir si, d'une part, il existe une volonté politique de favoriser par divers moyens cette intégration et d'autre part, si les acteurs concernés - professionnels, parents, bénévoles... - acceptent de se mettre autour d'une table, de réfléchir aux ressources à mettre en oeuvre pour que ces projets d'intégration soient possibles et les concrétiser.

Tout processus d'intégration, et au-delà, toute politique favorisant l'intégration des élèves handicapés en milieu spécialisé comporte des inconnues et même une part de risques : il serait cependant absurde de " condamner " une démarche d'intégration par crainte de celles-ci. L'intégration est avant tout un processus de co-construction de relations " intelligentes " entre des personnes de bonne volonté. Ce qui doit nous guider est l'intérêt de l'enfant mais aussi celui de chacun des partenaires ou des acteurs de ce processus : professionnels, parents de l'élève handicapé, sans oublier les autres élèves, les parents des autres élèves, et plus largement toute la communauté éducative. Ce processus tend idéalement vers une meilleure qualité de vie pour tous. Il doit être une chance pour tous d'apprendre à mieux gérer une situation de handicap.

Lieu d'apprentissages

Si elle est un lieu de vie pour l'enfant, l'école ne doit pas oublier qu'elle représente le lieu privilégié où certains apprentissages spécifiques (savoirs, compétences) vont pouvoir se réaliser. Toute école doit donc proposer à tout enfant un projet ambitieux ! Il est par ailleurs important de rappeler que notre pays a vu se développer depuis 1970 un enseignement spécialisé structuré et renfermant de nombreuses richesses, ce serait une erreur grave de faire fi de l'expérience acquise par celui-ci. L'intégration se construira donc dans le cadre d'un partenariat entre enseignement ordinaire et enseignement spécialisé et non dans une opposition un peu simpliste entre ces deux systèmes.

Des États généraux en 2007

En Communauté française de Belgique, la Ligue des droits de l'enfant a rassemblé une trentaine d'associations s'occupant d'enfants handicapés mais aussi d'enfants malades chroniques. Cette plate-forme développe diverses actions et prépare pour mars 2007 les États généraux pour l'accueil de tout enfant à l'école.

Le Cefes-ULB, Centre d'étude et de formation pour l'éducation spécialisée, établi en 1982, poursuit conjointement des recherches appliquées, des formations, des consultations (dont des suivis de projets d'intégration en milieu non spécialisé) et offre un service de documentation. Le Centre mène des études dans divers domaines dont celui de l'intégration. Actuellement, le Cefes est maître d'oeuvre ou collabore avec d'autres universités et avec la Ligue des droits de l'enfant pour diverses recherches : approche de la réalité des enfants intégrés " hors " enseignement spécialisé et suivis par un service d'accompagnement ; étude des ressources nécessaires à une école d'enseignement ordinaire pour accueillir un enfant handicapé ou malade chronique ; développement d'une méthodologie d'analyse du processus d'intégration à usage des services d'aide à l'intégration et autres services intervenants de l'intégration scolaire ; analyse des représentations et attitudes en lien avec l'intégration scolaire ; analyse des coûts/bénéfices de l'intégration scolaire.

L'intégration au niveau scolaire étant une partie d'un processus plus large d'intégration de la personne différente au sein de notre société, le Cefes-ULB mène également des travaux au niveau pré-scolaire (intégration d'un enfant handicapé en milieu crèche), para-scolaire (intégration d'enfants handicapés dans des plaines de jeux) et au niveau post-scolaire (insertion socio-professionnelle).

Tous ces travaux concourent à développer un modèle à la fois systémique et développemental de la problématique de l'intégration de toute personne en situation de handicap au sein de notre société. L'objectif est de promouvoir la citoyenneté et l'autodétermination de ces personnes tout en contribuant à apporter des éléments de réponse à une question essentielle : comment vivre ensemble ?

J.-J. Detraux
professeur et président du Cefes-ULB
M. Di Duca
S. Van Heghe