Répondre à la violence des ados
Si la sexualité reste " notre cheval de bataille ", des professeurs et, de plus en plus, des chefs d'établissement font appel
à nous pour d'autres difficultés. Au début des années 90, quand les violences dans les écoles apparurent, non seulement plus
nombreuses mais sous des allures peu présentes dans le passé (climat généralisé de désordre, d'indiscipline, de chahut ; insultes
et parfois coups aux professeurs ; non respect de la propriété privée allant jusqu'aux vols ; menaces et brutalités de parents
envers des enseignants, etc.), nous avons été appelés à intervenir dans des situations particulièrement dramatiques. Je relaterai
ici deux interventions qui caractérisent des formes de violences différentes.
Le suicide : la violence retournée contre soi
Le suicide des jeunes connaît une hausse dramatique : il est la première ou la deuxième raison de leur mortalité. Il s'avère
malheureusement " nécessaire " qu'un deuxième drame survienne au sein d'une école pour qu'il y ait une demande d'intervention.
C'est ce qui s'est passé dans cette école. Lors d'un premier suicide, aucune mesure d'information, de traitement psychologique,
de considération pour les sentiments des élèves n'avait été prise, ce qui a provoqué, lors du deuxième suicide, panique et
indignation chez les élèves, stupeur culpabilisée chez les enseignants ; d'autant plus qu'il s'agissait d'une amie de la première
victime. On peut parler ici d'une sorte de " violence institutionnelle ", dans le sens où l'école a " ignoré " ou tenté d'étouffer
ses répercussions.
Nous avons obtenu un subside permettant une action étendue sur deux années scolaires. Cela nous a permis, entre autres, d'élaborer
un projet éthique et psychologique ayant comme objectif : " favoriser une prise de conscience sur les valeurs positives de
la vie chez des élèves et des enseignants à partir d'un événement dramatique survenu dans leur établissement ". Les résultats
ont été à la mesure des moyens dont nous avons disposés et de la motivation élevée des enseignants, du directeur et des élèves.
La violence sexuelle dans une école du secondaire
Dans une classe de première professionnelle, une élève de 12 ans avait été forcée par un groupe de garçons de sa classe à
faire une fellation dans un parc à la sortie de l'école. Deux autres élèves avaient été tripotées de force. Un doigt avait
été introduit dans le vagin de l'une, alors qu'elles étaient maintenues par un groupe de garçons de leur classe, lors d'un
séjour en classes vertes.
L'école avait fait intervenir la justice. Quatre des auteurs avaient, dans un premier temps, été renvoyés provisoirement avant
de l'être définitivement. La demande du directeur concernait autant l'émoi et l'effervescence des élèves que ceux des enseignants,
du personnel de surveillance, et de lui-même. Il était principalement mis sous pression par son personnel féminin qui exigeait
une sévérité et surtout une répression qui ne correspondait pas à ses conceptions pédagogiques. Notre action a été trop limitée
pour que nous puissions avoir des résultats probants : d'une part, par le manque de moyens financiers dont l'école pouvait
disposer pour ce genre d'activité et d'autre part, par le manque de perspectives au niveau des besoins de réparation, de compréhension
et de prévention à long terme, objectif principal de nos interventions.
Dans le bilan de ce travail concernant la violence, il nous est apparu de toute évidence que ce qui empêche des résultats
à effets durables, ce sont les réactions qui visent essentiellement à punir, réprimer, museler. Ici comme ailleurs, le tout
sécuritaire ne peut être qu'un chèque en blanc signé pour une société future du chaos et de la barbarie.
Loin de moi l'idée de (re)proclamer " il est interdit d'interdire ", mais la violence, et particulièrement la violence sexuelle
des jeunes entre eux, doit être considérée comme un symptôme des plus alarmants de ce que Louis Roussel a nommé " L'Enfance
oubliée " (Edition Odile Jacob).
Marc Abramowicz Psychothérapeute, fondateur d'Aimer à l'ULB
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Aimer à l'ULB, depuis sa création, a animé dans les écoles des séances d'éducation sexuelle qui abordaient principalement
les thèmes de la contraception, de l'avortement, des relations sexuelles et affectives. Avec le sida et surtout avec l'affaire
Dutroux, nos animations d'information et de prévention ont évolué vers des interventions à la mesure des dangers que présentait
une maladie inconnue et non guérissable et de l'angoisse provoquée par l'irruption brutale de la violence sexuelle faite aux
enfants.
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