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Silence ! On vole...

Selon l'Institut bruxellois pour la gestion de l'environnement (IBGE), 73 % des Bruxellois estiment que le bruit représente la gêne environnementale la plus nuisible. Les premières sources de bruit pointées du doigt sont le trafic routier et les avions, suivis des bruits sur chantiers, bien avant ceux du voisinage, des trains et des trams. Les résultats de la radioscopie effectuée en 2001 montrent qu'un Belge sur quatre est mécontent de la pollution sonore (INS, 2001). Les études de Eurostat (2003) vont dans le même sens et indiquent, à l'échelle européenne, la même proportion de mécontents.

Normes et dangers

Les nuisances sonores peuvent être permanentes, diurnes ou nocturnes. C'est l'appareil auditif qui le premier en fait les frais. Mais des conséquences indirectes sont également relevées : troubles du sommeil, fatigue, stress et hypertension. Aussi, pour réglementer en matière de bruit, des normes ont-elles été établies. Selon l'Organisation mondiale de la santé, 55 décibels (dB) est le seuil de gêne excessive à partir duquel le bruit est susceptible de nuire à la santé. Pour bien dormir, bien étudier et se concentrer en journée, 30 dB sont les bienvenus. Cependant, avec une intensité dix fois supérieure, à 40 dB, le travail en bureau est jugé confortable. Et lorsque le plaisir est de la partie, un grand orchestre de 90 dB reste bien perçu, et même les 100 dB d'un tonnerre symphonique restent appréciés. Par contre, les 120 décibels d'un avion sur l'aire d'envol sont objectivement dangereux pour les tympans. Une fois au-dessus de nos têtes, la perception de ces décibels sera subjectivement amplifiée. La pollution atmosphérique à basse altitude et le sentiment d'insécurité lors du survol de zones densément peuplées les rendent encore plus insupportables.

L'Europe à la rescousse

Face aux " bégaiements " législatifs belges, la solution viendra, peut-être, de l'Europe. Pour réglementer l'évaluation et la gestion du bruit dans l'environnement, l'Union européenne dispose depuis 2002 d'une directive (2002/49/CE), ambitionnant de réduire sensiblement les nuisances sonores. Mais il faudra faire preuve de patience.À la date limite de juillet 2005, 11 États membres, dont la Belgique, n'avaient pas encore transposé la directive dans les législations nationales. Ce n'est qu'en 2007 que la Commission européenne proposera aux États membres des méthodes communes pour établir une cartographie du bruit. Les " cartes du bruit " concerneront les grands axes routiers de plus de 6 millions de passages de véhicules par an, les aéroports proches des agglomérations de plus de 1000.000 d'habitants et les axes ferroviaires de plus de 60.000 passages de trains par an. Les plans d'action pour gérer les effets du bruit ne sont programmés que pour juillet 2008. Quant aux mesures à prendre lorsque des dépassements sont constatés, les plans d'action sont prévus au mieux pour 2013 !

En attendant ?

En attendant, en Région bruxelloise, les 6 stations de mesures de l'IBGE indiquent souvent des dépassements de normes par les avions, sans pour autant que des mesures soient prises à l'égard des contrevenants. Ces stations, mobiles, bougent au gré des routes aériennes résultant d'arrangements politiques parfois éloignés de l'objectivité scientifique ou du bon sens... Même s'ils sont difficiles à évaluer, les effets physiologiques et psychologiques du bruit sont reconnus par tous. Il conviendrait d'en tenir compte en termes de pertes économiques, au même titre que les retombées économiques des " activités bruyantes ".

Mohamed El Aydam
ActuSciences, Inforsciences

Marie José Gama
ActuSciences, Inforsciences

Signe sans doute de progrès social, la Rome antique a légiféré afin d'atténuer les méfaits sonores des cliquetis des chars, jugés gênants pour le sommeil des citoyens. Il n'est pas étonnant que nos sociétés, à la pointe du développement social et économique, s'inscrivent dans la même démarche. Néanmoins, les considérations économiques à notre époque ont pris beaucoup d'importance. À telle enseigne que les solutions proposées pour la gestion du bruit de certaines activités ne font souvent qu'amplifier le brouhaha de la ville, en particulier autour des aéroports.



Pour en savoir plus: www.ulb.ac.be/inforsciences/actusciences

Le bruit, un son indésirable
Le son est défini comme toute variation de pression détectable par l'oreille humaine. Ces variations de pression se propagent de proche en proche dans le milieu. Comme toute pression, l'unité de mesure est le Pascal (1Pa =1N/m2). Le seuil de douleur se situe à environ 20 Pa, soit une pression acoustique un million de fois plus élevée que le seuil de perception de l'oreille humaine (20 Pa).
Pour ne pas manipuler des nombres dans une aussi large gamme, l'intensité ou le " volume " sonore est mesuré en décibels (dB). Cette unité utilise le logarithme en base 10 du rapport de l'intensité à mesurer sur l'intensité de référence (seuil d'audition). Une augmentation de 10 dB correspond à une augmentation d'intensité d'un facteur 10. Par convention, le seuil de perception correspond à 0 décibels (dB). Un son à 10 dB est à peine perceptible. On situe le seuil de douleur à 120 dB, alors qu'à 150 dB, l'ouïe serait endommagée de façon permanente.

 
  ESPRIT LIBRE > NOVEMBRE 2005 [ n°34 ]
Université libre de Bruxelles