Carte géologique
La Wallonie redessinée en profondeur
Refaire les cartes géologiques de la Région wallonne: ce projet a été mis sur pied à la fin des années 80 à l'instigation
du CAPAS (Comité de l'Académie pour les applications de la Science) ainsi que de deux professeurs d'université, MM. Dejonghe
(Service géologique de Belgique et ULB) et Conil (UCL). En 1990, un premier contrat d'essai, subventionné par la Région wallonne,
a permis d'enclencher la dynamique.
Science très jeune, la géologie est née en nos contrées, en Belgique, en France, en Angleterre... comme en témoignent les
nombreux étages géologiques dont les noms, adoptés internationalement, ont été empruntés à des localités wallonnes : Frasnien,
Famennien, Viséen
L'exploitation du charbon, du fer, du plomb et du zinc qui a naguère fait la richesse de la Wallonie n'est
d'ailleurs pas étrangère à cette " première ". Pour cette époque, cette carte était un document d'une qualité exceptionnelle.
Si sur le plan de la datation paléontologique (la stratigraphie) la carte a peu changé, par contre tout ce qui concerne la
déformation des roches sous des contraintes (la tectonique) est neuf. " On peut carrément parler de science neuve, née durant
les trente dernières années, explique Alain Herbosch: les interprétations tectoniques des nouvelles cartes ont entièrement
changé grâce à cette évolution ".
Des cartes, pour quel usage ?
L'utilité de ce type de cartes ne saute pas toujours aux yeux du profane. Or, il s'agit de l'outil de base de la gestion d'un
territoire: il permet la planification de la construction des routes, du bâti, de la pose de diverses canalisations et câbles,
tout comme celle des ressources souterraines très variées (matières premières de l'industrie et de la construction ; exploitation,
gestion et protection des nappes d'eau). Citons encore l'enfouissement des déchets industriels, domestiques et nucléaires;
le stockage souterrain du gaz; la prévention des risques naturels (tremblement de terre, glissement de terrain, radon
).
" Prenons un exemple récent, explique le professeur Herbosch: des compagnies internationales viennent de proposer au gouvernement
wallon un système de stockage du CO2 dans nos anciennes mines de charbon avec récupération du gaz qui s'y trouve encore. Un
des géologues de la carte (qui connaît particulièrement bien le Houiller) a été mis à la disposition du gouvernement pour
récupérer les vieilles observations minières, les " géo-référencer " par informatique, permettant ainsi une approche synthétique
en 3D d'anciens bassins miniers ".
La carte géologique représente sur un fond topographique la répartition en surface (sous les sols) de paquets de roches de
même nature ainsi que divers renseignements d'ordre géométrique qui permettent d'extrapoler la géométrie des couches jusqu'à
quelques centaines de mètres de profondeur.
Travail diversifié
Comment travaillent les géologues cartographes? Précisons que les cartes sont établies par 5 équipes de deux géologues appartenant
aux universités francophones (ULG, ULB, UCL, FPMS) et au Service géologique de Belgique. Chacune des équipes lève une carte
au 1/25.000e (15 km x 10 km) par an. Il s'agit d'abord de rassembler les données existantes: celles de l'ancienne carte, les
archives (qui s'accumulent depuis 1880!) du Service géologique répertoriant tous les travaux routiers, les sondages, etc.
Ensuite, il faut lire les nombreuses données dispersées dans la littérature scientifique. Puis, enfin parcourir toute la surface
de la carte pour trouver les affleurements. " Mes deux géologues, Sabine Blockmans et Virginie Dumoulin, sont sur le terrain
trois jours par semaine, armées d'un marteau, d'une boussole, d'une loupe, d'un carnet et de la carte au 1/10.000e sur laquelle
elles reportent leurs observations qui seront informatisées par la suite. Elles utilisent aussi les photos aériennes et satellites
(celles de Google notamment). "
Un métier d'avenir ?
Ce travail gigantesque réalisé sur la géologie wallonne a également permis de redynamiser le petit monde des géologues belges,
en mettant en contact des spécialistes de différentes disciplines, en impulsant des recherches, des projets de mémoire, des
collaborations transfrontalières. On peut parler de passion pour ces spécialistes qui pratiquent à la fois le terrain et mènent
parallèlement un travail de bénédictin dans le calme du bureau ou du laboratoire.
Le métier de cartographe géologue n'est pas très répandu, du moins chez nous. S'il s'est fort perdu dans les dernières générations,
on constate depuis quelques années une reprise très nette, en Europe pour la gestion de territoires fort habités et pollués,
et dans le monde entier pour la recherche du pétrole et des métaux de base dont les prix flambent. Dès lors, les spécialistes
de ce domaine seront de plus en plus recherchés
Alain Dauchot
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La Belgique fut le premier pays au monde à posséder une carte géologique complète à grande échelle (1/40.000e). Elle a été
établie entre 1890 et 1903 et ce sont ces cartes qui servent depuis près de cent ans... " Servaient " devrait-on dire, puisque
depuis quelques années, sous la houlette de Alain Herbosch, professeur au Département des Sciences de la Terre et de l'Environnement (Faculté des Sciences), de nouvelles cartes au 1/25.000e redessinent les couches de nos contrées, dans les limites de la
Région wallonne cette fois. Un travail de longue haleine - sur un total de 140 cartes, 45 ont jusqu'à présent été publiées
et 50 déposées - qui entre à présent dans sa dernière phase...
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En savoir plus
Les cartes déjà publiées sont vendues avec une notices explicatives et peuvent intéresser, entre autres, les promeneurs. Elles
sont par ailleurs consultables et imprimables gratuitement sur le Web:
http://environnement.wallonie.be/cartosig/cartegeologique/
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