Objectif " valorisation "
Esprit libre : Depuis la rentrée académique, vous êtes vice-rectrice à la recherche et au développement. Pourquoi avoir ajouté cette notion
de développement dans votre titre ?
Véronique Halloin : Jusqu'à présent, on parlait en effet de vice-rectorat à la recherche. En ajoutant la notion de développement, le recteur m'a
demandé de travailler en priorité également à une politique de valorisation des résultats de recherche. Dans le même esprit
d'interactions avec le monde économique, il a d'ailleurs aussi nommé un conseiller aux relations université-entreprises, Michel
Goldman.
Esprit libre : Pourquoi la valorisation est-elle importante pour l'Université ?
Véronique Halloin : Valoriser les résultats de nos recherches fait partie de nos missions-mêmes. C'est la 3e mission, celle de services à la société.
Grâce à cela, l'Université crée des emplois nouveaux et participe au développement économique régional. C'est aussi, comme
Claude Truffin l'a montré dans son livre (1) , une source de financement indispensable pour les universités. C'est également
un retour financier direct pour les laboratoires de recherche. C'est enfin une attractivité potentielle pour des étudiants
qui auraient l'esprit d'entreprise. La valorisation peut bien sûr prendre différentes formes - la prise de brevet, la cession
de licence, la création de spin-off, etc. - et peut concerner tous les secteurs, toutes les disciplines scientifiques.
Esprit libre : Les chercheurs eux-mêmes ont-ils cet esprit d'entreprise qui conditionne le " réflexe valorisation " ?
Véronique Halloin : Certains chercheurs l'ont puisque l'ULB compte aujourd'hui 19 spin-offs (dont certaines emploient plus de 80 salariés) et
avoisine la septantaine de familles de brevets. Mais nous pourrions, voire nous devrions faire mieux. L'ULB par exemple utilise
peu le programme First spin-off de la Région wallonne : nous avons obtenu neuf mandats ces six dernières années contre une
trentaine dans les deux autres grandes universités. Or ce mandat First spin-off génère en moyenne la création d'une demi spin-off.
Nous avons des forces mais aussi des faiblesses dans le processus de valorisation technologique, comme l'avait pointé il y
a quelques mois, l'adjoint du président pour la valorisation économique, Bruno Van Pottelsberghe. Nous aimerions mener une
évaluation similaire en sciences humaines où nous accueillons un grand nombre d'étudiants tout en souffrant d'un financement
insuffisant. Munis de cette analyse de l'existant, nous pourrons mieux agir demain.
Esprit libre : On se doute qu'un des axes d'action sera la sensibilisation en interne. A-t-elle déjà démarré ?
Véronique Halloin : Bien sûr, la nouvelle équipe du recteur s'inscrit dans le prolongement de ce qui a déjà été mené pour développer la culture
entrepreneuriale au sein-même de l'ULB. En Faculté des sciences appliquées, par exemple, les étudiants sont sensibilisés à
la création d'entreprises dès leur première année d'études. Nous pourrions nous inspirer de cette démarche à destination cette
fois des chercheurs dans les écoles doctorales. Nous devrons aussi assurer un meilleur coaching des académiques désireux de
se lancer dans la création d'une spin-off. Nous ne voulons évidemment pas forcer chaque chercheur à devenir entrepreneur mais
nous tenons à l'informer au mieux et à l'aider autant que possible lorsqu'il choisit la voie de la valorisation. La distinction
entre recherche fondamentale et recherche appliquée a désormais fait place, comme le montre notamment le plan Marshall et
les pôles de compétitivité, aux notions de recherche libre et de recherche orientée à finalité économique. Les deux coexistent
au sein des laboratoires et se nourrissent mutuellement, au bénéfice de tous.
Nathalie Gobbe
|
Sans pour autant vouloir décrocher la lune, l'Université s'est fixé comme objectifs d'intensifier la valorisation économique
de ses recherches. Rencontre avec Véronique Halloin, nouvelle vice-rectrice à la recherche et au développement à l'ULB.
|
(1) L'université déchiffrée. Le financement des universités en Communauté française de Belgique, Claude Truffin, Éditions
de l'Université de Bruxelles, 2006
|