Le numerus clausus : une nécessité absolue
Le gouvernement fédéral a décidé, en 1997, de mettre en uvre une limitation du nombre de médecins diplômés des universités
pouvant entrer en formation de spécialisation (médecine générale et spécialisée).
La première promotion des médecins à qui s'appliquera cette décision sera diplômée en 2004. Une clé de répartition a été
définie, entre communautés française et flamande, et entre médecins généralistes et spécialistes (40/60). Récemment, dans
l'éventail du choix des spécialisations, une définition des places disponibles dans chacune des spécialités a été précisée,
pour tenir compte de besoins futurs. Le Gouvernement fédéral a également réservé, au sein du quota de spécialistes, une marge
de sécurité de quinze %, non attribuée dans les sous-quotas, permettant de favoriser des filières spécifiques, comme par exemple
la psychiatrie.
Les raisons d'avoir introduit le numerus clausus sont nombreuses. Elles ont trait à la qualité de la formation pendant l'enseignement
de graduat universitaire, au maintien de la qualité d'une pratique professionnelle au cours de la carrière médicale, et au
souci de maîtriser les dépenses de l'assurance maladie. Les études annuelles réalisées conjointement par le DULBEA et la
KUL démontrent un lien entre l'abondance de l'offre médicale et la consommation plus élevée de soins médicaux dans les différents
arrondissements du pays, à situation socio-économique identique des patients.
Une récente étude réalisée à l'initiative de l'INAMI révèle que dix sept pour cent des médecins généralistes agréés (codes
INAMI 003 - 004) ont moins de cinq contacts-patients par jour. Parmi ces médecins, on retrouve, sans surprise, les jeunes
généralistes, une proportion élevée de femmes (deux tiers en dessous de 40 ans), et des médecins de plus de 60 ans. Trente
pour cent de ces médecins n'exercent que la médecine générale en cabinet.
Assurément, non. Il existe incontestablement un " chômage caché " dans la profession médicale : de nombreux médecins ne peuvent
exercer à plein temps leur profession, faute de clientèle ou de fonction hospitalière à disposition. L'activité à temps partiel
est souvent imposée par les circonstances, sans être un choix de vie du médecin.
Dans de nombreux hôpitaux, une réduction du nombre de candidats spécialistes pourra être compensée par l'engagement de spécialistes
désoeuvrés, par une réorganisation du travail médical, en profitant des gisements de productivité, par une réorientation vers
le " core business " (entre autres en réorganisant la répartition des tâches dans le sens d'une meilleure collaboration entre
médecins généralistes et médecins spécialistes par exemple pour le follow-up des patients).
En raison de l'agenda tardif de mise en route du numerus clausus, le nombre de médecins, selon les projections de la santé
publique, atteindra en 2015 le niveau que nous connaissions en 2000 !
Sans aucun doute, et l'ABSyM l'a répété depuis toujours, une sélection à la sortie de la première candidature.
Totalement indéfendable est le choix politique que pose aujourd'hui la communauté française. En décidant de supprimer toute
procédure de sélection aux études médicales, et de reporter hypocritement à la fin de la septième année d'études la sélection
qui devra s'imposer pour respecter les quotas fédéraux, la Communauté Française s'isole par rapport à l'attitude qui prévaut
dans la plupart des pays européens. Les risques sont nombreux de voir accourir chez nous les cohortes d'étudiants européens
refusés dans leur pays, comme ont le vit aujourd'hui en médecine vétérinaire à l'université de Liège. Avec pour corollaire
une surcharge de financement au frais de la communauté, et une perte tragique de la qualité de l'enseignement et de la valeur
du diplôme délivré.
En outre, il s'agit d'une grave faute politique, qui offre sur un plateau d'argent un argument massue à tous les promoteurs
d'une défédéralisation des soins de santé. Déjà aujourd'hui en Flandre, de nombreuses voix s'élèvent pour demander d'urgence
la scission des soins de santé selon les communautés, la surproduction de médecins francophones devant se traduire bien évidemment
par une augmentation encore plus importante des dépenses au sud du pays, niveau de dépenses qui est déjà stigmatisé lourdement
au nord.
Jacques De Toeuf Président de l' ABSyM
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