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Coopératives d'activités : faire un bout de chemin avec Azimut

Esprit Libre : Comment est née Azimut, première coopérative d'activités en Belgique ?
Valérie Galloy : L'idée est née au sein de l'agence conseil ACES, où nous étions déjà actifs de 1995 à 1997 dans le domaine de l'accompagnement des TPE (Très petites entreprises) dans le secteur de l'économie sociale. C'est dans le cadre d'un échange avec le Fonds social européen et CAP Services à Lyon, la première coopérative d'activités, qu'on a trouvé les réponses à nos questions sur une méthodologie d'accompagnement appropriée à des entrepreneurs en création. On a donc transféré le projet en Belgique. Les deux fondateurs, Jean-François Coutelier et Benoît Smets, ont été les premiers à tester la méthode puisqu'ils ont lancé leur activité d'entrepreneurs à cette occasion ; le premier dans l'informatique, le second dans le management intérimaire. Nous avons eu un premier budget de la Région wallonne en 2000 pour mettre en place nos activités et pu accueillir les premiers entrepreneurs à partir de 2002.

Esprit Libre : Qu'est-ce qui caractérise votre coopérative d'activités ?
Valérie Galloy : L'idée est d'engager des entrepreneurs dans le cadre de la coopérative sous un statut d'entrepreneurs-salariés. Cela leur permet de tester leur activité avant de se lancer, en minimisant les risques au démarrage. La coopérative permet une souplesse pour passer du statut de demandeur d'emploi à celui d'indépendant. Quand les premiers bons de commande sont signés, l'entrepreneur " en devenir " devient salarié (contrat de minimum 4h semaine) et c'est son chiffre d'affaires qui paye son salaire. La personne peut garder un complément de chômage pendant cette période, si elle y a droit. Notre aide consiste à fournir à nos membres un statut juridique et un accompagnement commercial, de gestion, de réflexion de leur activité. Un accompagnement humain également. L'entrepreneur peut se concentrer sur la recherche de clients et la production. Par ailleurs, tous les mois, un club d'entrepreneurs de la coopérative se réunit. C'est l'occasion d'échanges assez riches entre l'informaticien, la gérante de salon de coiffure, le consultant en communication, etc. Développer son activité passe aussi par la création d'un réseau.

Esprit Libre : Concrètement, qui s'adresse à vous ?
Valérie Galloy : Pour venir dans la coopérative d'activités, il faut un savoir-faire, un métier. Un de nos slogans est : " vous n'avez rien à perdre à essayer pour voir... ". Nous cherchons à mettre ces personnes en situation de tester leur activité. Si cela ne fonctionne pas, elles peuvent retrouver leur statut initial. On n'accepte pas tous les projets : les activités du type commerce, qui demandent un financement de départ important, ou beaucoup de stock, ne peuvent entrer en ligne de compte. La formule est intéressante pour les demandeurs d'emploi (qui représentent 80 % des personnes venant nous voir) même si elle est ouverte à d'autres publics. Trois jeunes universitaires ont ainsi créé leur société coopérative (Shift-zone) après être restés un an chez nous. Nous ne voulons d'ailleurs pas faire de ghetto, ni en termes de profil, ni en termes d'activité.

Esprit Libre : Vous insistez sur le fait que vous n'êtes pas là pour faire de l'assistanat...
Valérie Galloy : Les personnes qui viennent chez nous se comportent comme des indépendants, même si elles sont salariées... Mais ce sont elles qui ont les mains sur le volant. Nous sommes là pour les aider à lire la carte, à faire en sorte qu'elles ne fassent pas de détour inutile, qu'elles ne prennent pas de sens interdit. Et on tire le frein à main quand elles brûlent les feux rouges (car la " voiture " nous appartient). Par ailleurs, nos ateliers de préparation sont très concrets : on leur apprend à réaliser un folder commercial, une tarification, un plan de prospection...

Esprit Libre : Le but, finalement, c'est que ces personnes sortent de votre structure...
Valérie Galloy : Nous ne sommes qu'un passage, la réussite ne dépend pas de nous... Fin décembre 2004, une quinzaine de personnes sont sorties de notre structure, dont 6 se sont liées à d'autres sociétés coopératives pour continuer leur activité. C'est aussi un de nos objectifs. Sur les 87 personnes sorties à ce jour, un tiers s'est autonomisé en tant qu'indépendant, un autre tiers a retrouvé un emploi (grâce aux contacts noués dans le cadre de la coopérative), le dernier tiers a abandonné, s'est réorienté, ou a repris une formation.

Esprit Libre : quel bilan tirez-vous de ce projet aujourd'hui ?
Valérie Galloy : Nous sommes sortis de la phase pilote. Le rythme continue à s'accélérer, les demandes augmentent. Nous avons des bureaux à Charleroi mais aussi à Namur et à Tournai. Une autre coopérative d'activités a vu le jour à Libramont ; deux autres existent en Flandre. Nous sommes d'ailleurs regroupés dans le cadre du réseau COPAC. Aujourd'hui, ce réseau essaie d'avoir une reconnaissance en termes de statut juridique. Nous essayons par ailleurs d'avoir un cadre légal pour l'obtention de financements pour les coopératives d'activités. Ce qui faciliterait les choses...

Alain Dauchot


Azimut est une coopérative d'activités située à Monceau-Fontaine. L'idée centrale de cette structure ? Favoriser l'éclosion d'entreprises de services et d'artisanat en offrant aux futurs entrepreneurs un encadrement humain, entrepreneurial et administratif pour leur permettre de tester leur activité d'indépendant sans les risques habituels. Via, notamment, un statut d'entrepreneur-salarié. Une entreprise qui se félicite lorsque ses employés la quittent et volent de leurs propres ailes : voilà qui n'est pas balal ! Rencontre avec Valérie Galloy, accompagnante de projets à Azimut.



L'équipe d'Azimut, fin décembre : une quinzaine d'entrepreneurs-salariés sont sortis de la structure pour voler de leurs propres ailes...

 
  ESPRIT LIBRE > MARS 2005 [ n°29 ]
Université libre de Bruxelles