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Agrotechonolgie : prévoir et préserver la santé des arbres

Les activités de recherche initiées dans le Laboratoire d'agrotechnologies végétales de l'ULB, d'abord par le professeur Lannoye et ensuite par le professeur Delhaye, sont plus que jamais d'actualité. En effet, la quantification physiologique de l'impact des stress biotiques et abiotiques du milieu constitue une approche originale lorsqu'elle se réalise au niveau de la plante entière : l'effet mesuré tient compte des interactions internes à la plante permettant notamment la mise en place d'éventuels mécanismes de résistance et d'adaptation.

Les technologies de pointe utilisées pour " prendre le pouls d'un végétal " sont conçues pour des mesures in situ. Essentiellement orientées vers l'analyse des perturbations de l'activité photosynthétique (au niveau des réactions photochimiques primaires, de la fixation du CO2, de la quantité de chlorophylles et autres pigments photosynthétiques) de la plante, ces techniques sont portables, rapides et non destructives. En quelques minutes, des centaines de mesures sont réalisées sur le végétal analysé, sans devoir détacher la feuille de la plante, ce qui augmente la fiabilité statistique du signal mesuré,.

De Porquerolle à San Rossore

Suite aux activités anthropiques croissantes, la pollution est un des facteurs de stress particulièrement intéressants à étudier au vu de l'impact dévastateur sur les plantes.
Depuis début 2005, un projet Marie Curie financé par la Commission européenne a permis à quatre doctorants dont une doctorante roumaine, Adriana Jalba, inscrite à l'ULB, de se pencher sur l'effet des embruns marins sur la végétation côtière et principalement sur des sites présents sur le pourtour de la Méditerranée. Deux sites expérimentaux ont été choisis au vu des dégâts importants de la pollution en général sur la végétation. Il s'agit de l'île de Porquerolle dans le Sud de la France, particulièrement exposée aux embruns en provenance de la côte d'Azur (région portuaire de Marseille) et du Parc régional de San Rossore à Pise (Italie) à l'embouchure du Fleuve Arno ramenant des polluants de villes industrielles telles que Florence et Pise.

L'originalité de ce projet réside dans l'approche méthodologique pluridisciplinaire intégrant des mesures physiologiques sur la végétation des sites et des analyses chimiques, au niveau de l'air, de l'eau et du sol afin d'identifier les causes du dépérissement. Le Centre technique européen de la multinationale Procter and Gamble est partenaire et coordinateur du projet ; y participent également : l'Université d'Utrecht (Pays-Bas), l'Agence internationale pour l'énergie atomique à Monaco et le Centre national de recherche scientifique (CSIC) de Cadix (Espagne).

Les pathogènes de la Drève de Lorraine

Plus près de chez nous, un autre type de pollution est présent de manière sournoise. Il s'agit de la pollution rencontrée en milieu urbain : différents facteurs combinés mettent à mal la santé de nos arbres. Ces derniers se voient affaiblis par des conditions de croissance défavorables et deviennent des proies privilégiées pour des pathogènes agressifs tels que les champignons lignivores qui dégradent la lignine du bois et transforment, en fonction du mode d'action, le tronc, les branches ou les racines en véritables éponges sans tenue mécanique.

Les hêtres pourpres de la Drève de Lorraine à Bruxelles, axe d'accès principal à la capitale reliant Rhodes-St-Genèse au bois de la Cambre, sont un exemple d'alignement d'arbres attaqués par des pathogènes dangereux. La plantation très serrée réalisée à l'origine pour donner un aspect paysagé particulier n'était pas un milieu de croissance idéal pour ces arbres qui sont entrés en compétition les uns avec les autres pour la lumière et pour les éléments minéraux du sol. Le milieu de croissance a également fortement évolué au cours de ce dernier siècle notamment avec l'intensification de la fréquentation du site par les automobilistes. Inévitablement, ces arbres se sont affaiblis et ont été attaqués par l'armillaire (Armilaria melea), un champignon lignivore dégradant essentiellement le système racinaire des arbres.

Une convention de recherche a été établie en 2003 avec le Ministère de la Région Bruxelles Capitale (Administration de l'équipement et des transports/Service des voiries) en collaboration avec le Laboratoire d'écotoxicologie environnementale de la Faculté universitaire agronomique de Gembloux (Prof. Roger Paul) afin d'évaluer le dépérissement et de mieux comprendre le mode d'action du pathogène, les remédiations éventuelles et le futur de ces arbres. Actuellement, l'accent est mis sur l'amélioration des substrats de plantation essentiels pour un développement optimal et harmonieux au cours de la croissance de l'arbre.

Car étudier les arbres sous-entend tout mettre en oeuvre pour les protéger mais aussi accepter leur mort et les remplacer par des espèces bien adaptées au site. Ils doivent croître pour que les générations futures aient la chance de retrouver des arbres centenaires dans leurs avenues urbaines.

Dr Ir Murielle Eyletters
Service de mécanique des sols

Depuis 1997, les travaux de recherche en arboriculture menés à l'initiative du Laboratoire d'agrotechnologies végétales de l'ULB se poursuivent au sein de l'institution. Au coeur de ces recherches, l'étude du stress végétal notamment dû aux effets de la pollution et du milieu urbain. Aperçu de plusieurs projets actuellement en cours, qui concernent, d'une part, la végétation du pourtour méditerranéen et, d'autre part, la Région bruxelloise.



 
  ESPRIT LIBRE > MARS 2006 [ n°38 ]
Université libre de Bruxelles