Élections : quand l'immigration refait surface
Les questions qui seront mises à l'agenda politique ne sont pas totalement étrangères à certaines dispositions légales prises
ou pas prises par le gouvernement arc-en-ciel. Ainsi, pour établir les enjeux politiques sur l'immigration de la campagne
électorale, il faut revenir sur la politique suivie par l'arc-en-ciel en la matière. Dans la déclaration gouvernementale de
1999, le ton était donné, synthétisé par deux substantifs : fermeté et humanité.
Régularisation partielle des sans-papiers
Deux mesures spécifiques caractérisent le pôle humanité. La première concerne une des toutes premières lois adoptées par le
gouvernement : la régularisation des sans-papiers, traduction politique d'un mouvement de revendication débuté en 1996 qui
réclamait l'attribution d'un titre de séjour aux étrangers séjournant en Belgique depuis de nombreuses années. Ayant débuté
en janvier 2000, les chiffres officiels ne sont toujours pas connus. La mise en oeuvre de cette mesure a suscité des réactions
très différentes au nord et au sud du pays. Les Flamands estimaient qu'il s'agissait d'une disposition désirée surtout par
les francophones. Conçue comme une opération non-reconductible, la régularisation de 2000 n'a pas épongé toutes les situations
de séjour illégal et le nouveau retard pris dans l'examen des demandes d'asile risque de fabriquer durablement de nouveaux
sans-papiers. Ce thème reviendra nécessairement à l'agenda du débat politique même si les partis flamands ne désirent plus
en entendre parler.
Le gouvernement arc-en-ciel a aussi adopté au cours de la dernière législature une nouvelle modification du Code de la nationalité
belge, qui en fait une législation très libérale. En effet, en autorisant les étrangers en séjour légal depuis sept ans à
pouvoir obtenir la nationalité belge sur simple déclaration, et donc sans introduire de demande de naturalisation, la Belgique
a considérablement assoupli la législation en la matière. L'application de cette législation est contestée, surtout en Flandre
où l'on voudrait voir la réintroduction de critères autres que la seule durée de résidence pour évaluer si les étrangers "
méritent " la nationalité belge. Certains partis politiques flamands souhaitent, et cela pour la première fois, restreindre
les conditions d'accès à la nationalité belge.
Mesures de fermeté
Si la modification du Code de nationalité n'est pas ouvertement affichée durant la campagne électorale, elle risque de ressurgir
à l'occasion de la discussion d'un autre dossier qui lui est systématiquement couplé : le droit de vote des étrangers au niveau
communal. Cette revendication vieille de trente ans n'a pas abouti au cours de la législature en raison du refus du VLD. Le
MR a retiré son soutien aux propositions de loi déposées au Sénat tout en affirmant que l'attribution de ce droit deviendrait
un point important lors de la négociation du futur gouvernement.
De toute évidence, le droit de vote sera un thème de campagne et le VLD sera soumis aux pressions de ses anciens partenaires
et aussi à celles du Vlaams Blok. Parmi les mesures dites de fermeté du gouvernement arc-en-ciel figurent la réforme de la
procédure d'asile et surtout les pratiques accélérées d'expulsion des étrangers en séjour illégal. Ce pôle fermeté sera réaffirmé
durant la campagne électorale ainsi que de nouvelles mesures répressives et sécuritaires demandées par certains partis telles
que l'exclusion des mineurs étrangers non-accompagnés, la réforme de la procédure d'asile, le maintien de la double peine,
le renforcement de l'activité des Centres fermés. Une fois encore le discours du Vlaams Blok, essentiellement en Flandre,
va peser sur la campagne électorale.
L'immigration ressurgira à partir d'un autre thème, celui de la sécurité et plus spécifiquement de la petite délinquance urbaine.
L'insécurité devient une expression métonymique pour désigner l'immigration, particulièrement dans le discours du Vlaams Blok
qui entend ainsi se mettre à l'abri de la législation réprimant le racisme. Par contre, un sujet sera sûrement absent de la
campagne, et pourtant il est crucial : celui portant sur la réouverture des frontières et les nouvelles migrations. Mais c'est
un sujet politiquement tabou.
Andrea Réa Directeur du GERME
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Bien que les partis politiques ne semblent pas insister dans leur programme électoral sur le thème de l'immigration, cette
dernière va immanquablement ressurgir durant la campagne et aussi lors des négociations du prochain gouvernement.
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