Des bourses pour combattre le cancer
Esprit Libre : En tant que responsable du Dé
partement d'hématologie clinique, vous devez chapeauter de nombreux
projets...
Dominique Bron : L'hématologie évolue sans
cesse. C'est pourquoi nous travaillons en étroite relation avec le Département
d'hématologie expérimentale dont les chercheurs nous sont précieux. Les grandes
lignes de nos activités consistent, par exemple, en l'amélioration des
techniques de transplantations pour les cancers et leucémies qui en nécessitent
; sur l'avancée en leucémie lymphoïde chronique, une sorte de cancer dont les
cellules touchées ne vieillissent plus et s'accumulent dans l'organisme ; ou
encore sur le sang de cordon avec un programme conçu pour faire proliférer les
cellules souches récoltées. Les domaines sont aussi nombreux que variés, et
subsidiés par différents fonds.
Esprit Libre : Un nouveau projet va également
bientôt voir le jour...
Dominique Bron : Oui, grâce à la bourse octroyé
e par la Fédération belge contre le cancer. Nous allons sélectionner des
patients chez qui la qualité et/ou la quantité de cellules récoltées pour une
greffe se révèle trop pauvre. Le but consiste à comparer deux approches
cliniques permettant d'obtenir un quota suffisant de cellules souches à transfé
rer. Pour la première, qui privilégie l'approche qualitative, nous prélevons un
échantillon de cellules souches au niveau de la moelle osseuse. Après une mise
en culture avec des facteurs de croissance, on sélectionne les cellules mé
senchymateuses (cellules adhérentes) qui seront réinjectées au patient. Tandis
que pour la seconde, qui privilégie l'approche quantitative, nous utilisons la
moitié des prélèvements pour la mise en culture des cellules souches, alors que
l'autre moitié est conservée à - 200° dans l'azote liquide. Lors de la
transplantation, l'ensemble des cellules obtenues est réinjecté au patient qui
bénéficiera de ce fait de plus de cellules réinjectables lui permettant de ré
cupérer plus rapidement. Deux groupes de patients recevront donc chacun un
traitement, afin de nous permettre de comparer, et d'ensuite privilégier
l'option qualité, l'option quantité ou une formule mixte, selon leur rentabilité
et leur efficacité.
Esprit Libre : Qu'envisagez vous comme effets
?
Dominique Bron : Que les résultats chez
l'humain rencontrent les succès obtenus chez l'animal. Nous souhaitons suivre
150 patients en 3 ans, dont 75 recevront les cellules stimulées et 75 le mé
lange de cellules souches et de cellules nourricières. Pour le premier groupe,
nous sommes persuadés d'obtenir rapidement un grand nombre de cellules. Pour le
second, nous espérons que les cellules se multiplieront tout en gardant leur
potentiel en qualité. Il est par contre trop tôt pour dire si une hypothèse se
révélera meilleure que l'autre. Par contre, les facultés de récupération après
une greffe se verront améliorées, et nous espérons diminuer le séjour en
chambre stérile de 2-3 semaines à moins de 7 jours. Cela représentera pour les
patients un gain important en qualité de vie grâce à une hospitalisation moins
longue. Sans parler des économies financières à tous niveaux.
Esprit Libre : Concrètement, que représente ce
soutien financier de la Fondation ?
Dominique Bron : Ces 120.000 euros sur trois
ans nous permettent d'envisager l'application de ces techniques de recherche.
Il faut acheter du matériel, payer un jeune chercheur pour toutes les mises en
cultures, les manipulations, les analyses, etc. Sans cette bourse, notre
recherche ne pourrait pas avoir lieu, tout simplement.
Laurent Cortvrindt
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En Belgique, 40.000 nouveaux cas de cancer sont découverts chaque année. Cela
signifie qu'au cours de sa vie, une femme sur trois et un homme sur deux, de
plus de 85 ans, auront été confrontés à cette maladie. Heureusement, 230.000 gé
néreux donateurs ont permis à la Fédération belge contre le cancer de répartir
10.250.000 euros en bourses pour 49 équipes de chercheurs universitaires. Une vé
ritable bouffée d'oxygène pour de nombreux projets, comme celui du professeur
Dominique Bron, de l'Institut Jules Bordet.
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Les projets soutenus à l'ULB
Outre l'équipe du Pr. Dominique Bron, neuf autres projets de l'ULB figurent
parmi les lauréats : en cycle cellulaire, on retrouve l'équipe du Dr Pierre
Roger à Érasme (150.000 euros sur 3 ans) ; en immunologie, l'équipe du Dr
Muriel Moser à Gosselies (330.000 euros sur 3 ans) ; en génétique, les équipes
du Dr François Fuks et du Pr. Yvan de Launoit à Érasme, et du Dr Carine Van
Lint-Messenguy à Gosselies (390.000 euros sur 3 ans), du Dr Laurence
Lagneaux-Delforge à Bordet (300.000 euros sur 3 ans), du Dr Claude Szpirer à
Gosselies (150.000 euros sur 3 ans) ; et en études cliniques, les équipes du Dr
Christos Sotiriou à Bordet (180.000 euros sur 3 ans), du Pr. Thierry Velu à
Érasme (150.000 euros sur 3 ans) et du Pr. Alina Ferster à Brugmann (50.000
euros sur 2 ans).
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