Céline Préaux
À la recherche du passé
Esprit libre : Vous êtes licenciée en Histoire. Qu'est-ce qui vous a poussée vers cette discipline ?
Céline Préaux : L'Histoire me passionne depuis que je suis toute petite. Mon grand-père a transmis sa passion à mon père, qui me l'a transmise
à son tour. Mon grand-père m'emmenait souvent en visite dans des musées ou sur des sites archéologiques et mes parents étaient
des férus de visites de châteaux (on a fait tous les châteaux de la Loire) ainsi que d'autres lieux d'histoire. On peut donc
dire que c'est une tradition familiale. En primaire déjà, j'y ai pris goût en lisant les bandes dessinées d'Astérix et Obélix
! En secondaire ensuite, la dimension historique du cours de latin et une professeur d'Histoire particulièrement passionnante
ont renforcé mon intérêt pour cette matière. M'inscrire en Histoire à l'ULB m'a donc semblé une évidence.
Esprit libre : En quoi votre histoire familiale et personnelle vous a-t-elle sensibilisée aux rapports entre les communautés linguistiques
d'un même pays ?
Céline Préaux : Mon histoire familiale n'a pas vraiment compté puisque ma mère est d'origine flamande et sa langue maternelle est le français
tandis que mon père est d'origine francophone et parle couramment le néerlandais. Mes parents ont donc décidé de me placer
dans l'enseignement flamand dès la maternelle pour que je sois bilingue. Je me suis rapidement rendu compte d'importants problèmes
communautaires car nous, les francophones, étions stigmatisés. On m'a par exemple punie d'avoir parlé français dans la cours
en me fermant la bouche avec un autocollant sur lequel il était inscrit " Nederlandstalig onderwijs ". Et il y a eu beaucoup
d'autres épisodes de ce genre, dont certains étaient encore plus graves. La manière d'enseigner l'Histoire de Belgique m'a
également interpellée : en rhéto, en Flandre, le cours d'Histoire était essentiellement axé sur la question linguistique alors
qu'en 1e candidature à l'ULB, seules quelques pages du syllabus y étaient consacrées. Mes amis francophones ne savaient que
peu de choses sur cette question et me trouvaient " obsédée " par ce déséquilibre. J'ai donc voulu en savoir plus.
Esprit libre : Vous avez présenté votre ouvrage (*) à la dernière foire du livre de Bruxelles. Dans quelles circonstances votre mémoire
sur les procès de la Sipo à Dinant vous a-t-il servi de base à la rédaction de votre premier livre ?
Céline Préaux : Mon mémoire a plu à Pieter Lagrou, mon promoteur, et à mes lecteurs, Serge Jaumain et Jean-Philippe Schreiber. Sur un coup
de tête, j'en ai remis une copie à trois maisons d'édition, et l'une d'entre elles s'est montré intéressée. Comme mon travail
de fin d'étude était très synthétique, pour le livre, j'ai abordé de façon plus large la répression des criminels de guerre
et leurs collaborateurs en confrontant le procès de la Sipo (ndlr : la Sicherheitspolizei) avec d'autres procès qui ont eu
lieu en Belgique et en envisageant d'autres juridictions, de manière à comparer la façon dont les Belges et les Allemands
ont été traités par la justice.
Esprit libre : Votre champ d'étude vous amène à étudier des périodes assez noires de l'Histoire de Belgique... Quels sont vos autres centres
d'intérêts ?
Céline Préaux : La 2e Guerre mondiale, mon dada, m'a donné envie d'étudier la période contemporaine. De façon plus large, les guerres, l'Histoire
internationale, l'Histoire des femmes et le féminisme m'intéressent également. En dehors de l'Histoire, je suis une fan de
cinéma - j'y vais en moyenne une fois par semaine - et j'aime la culture sous toutes ses formes, les visites, les balades
et les voyages.
Esprit libre : Après votre DEA en études transdisciplinaires et interfacultaires et votre doctorat, pensez-vous poursuivre sur la voie de
la recherche ?
Céline Préaux : J'aimerais bien, oui, sans savoir pour autant dans quel centre de recherche. Une fois diplômée, j'ai déposé ma candidature
au Centre d'études et de documentation Guerres et sociétés contemporaines (CEGES). Ils l'ont retenue mais sans pouvoir m'engager
pour des raisons de budget. Depuis, je me suis écartée du sujet de la 2e guerre mondiale pour me pencher sur la question linguistique.
Dans le cadre de ma thèse réalisée en co-tutelle avec l'Université d'Ottawa, je vais passer un an au Canada afin d'y étudier
les rapports entre les francophones et les anglophones. Peut-être des opportunités de recherche se présenteront-elles là-bas.
Esprit libre :
Céline Préaux :
Amélie Dogot
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Licenciée en Histoire en juin 2006, Céline Préaux est l'auteure de " La Gestapo devant ses juges en Belgique ", paru en février
dernier. Passionnée par l'étude des guerres et de la question linguistique, cette historienne de 22 ans prépare actuellement
une thèse de doctorat sur les francophones de Flandres, des origines à nos jours.
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(*) La Gestapo devant ses juges en Belgique, par Céline Préaux, Éditions Racine, 2007. Voir en page " livres ".
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