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[à l'université]
 
 
 
L'ADN, cette " simple " molécule

L'ADN... 50 ans déjà ! Le 25 avril 1953, un petit article dans la revue Nature secouait le monde scientifique : Watson l'Américain et Crick le Britannique, tous deux jeunes chercheurs à l'Institut Cavendish (Cambridge) révélaient la structure en double hélice de l'ADN. Bien sûr, Watson et Crick n'étaient pas les seuls scientifiques à étudier alors la structure de cette molécule d'ADN. Sans doute, bien d'autres chercheurs auraient pu eux aussi mettre à jour cette double hélice. Mais, Watson et Crick eurent le génie ou la chance de le faire les premiers, avec des arguments physico-chimiques suffisamment convaincants.

Dès les années 30 et les travaux d'Avery, les scientifiques savaient que l'acide desoxyboribonucléique, le fameux ADN, était le support des informations génétiques. Restait pourtant une question intrigante, rappelle Hubert Chantrenne, un des pionniers de la biologie moléculaire à l'ULB : " comment une molécule chimique pouvait-elle transmettre un message véhiculant tous les caractères héréditaires ? ". La réponse viendra de cette structure linéaire formée des quatre bases (A, C, G, T) et de la disposition de ces bases deux à deux, en vis-à-vis, comme l'ont décrit Watson et Crick.

Dans le laboratoire du Rouge-Cloître (ULB, Auderghem), le professeur Brachet dirigeait, à l'époque, des travaux sur les propriétés physicochimiques de l'ADN, qui alimentèrent cette réflexion.

À l'ULB

" En 1942, Jean Brachet démontrait que toutes les cellules vivantes (qu'elles soient animales, végétales, de levure ou encore bactériennes) contenaient à la fois de l'ADN (constituant permanent du noyau) et de l'ARN ", explique Hubert Chantrenne. " Il montra que l'ARN était présent dans des proportions variables dans les tissus des êtres vivants : son accumulation était surtout importante dans les tissus fabriquant beaucoup de protéines, ce qui laissait entendre déjà à l'époque que l'ARN était impliqué dans leur synthèse ". La démonstration allait suivre quelques années plus tard, en particulier avec les travaux de Raymond Jeener, Hubert Chantrenne et leurs collaborateurs.

En ce qui concerne l'ADN, au début des années 50, René Thomas alors jeune étudiant à l'ULB, vérifiait le dosage des quatre bases de l'ADN dans les cellules de différents organismes. Lors de ses manipulations par spectrométrie, il remarqua que la quantité des bases semblait augmenter lorsque l'ADN était soumis à une élévation de température. Il venait de mettre en évidence le phénomène de dénaturation de l'ADN : à haute température, les deux hélices de l'ADN se séparent et l'absorption de la lumière UV par les bases augmente.

Dans le domaine du transfert de l'information génétique à partir de l'ADN, Arsène Burny, Marbaix et Chantrenne réussirent, eux, le premier isolement d'un ARN messager eucaryote, celui de l'hémoglobine de lapin. En collaboration avec Gurdon à Oxford, Marbaix effectuait ensuite la démonstration ultime que cet ARN contient bien l'information pour cette protéine. Gurdon et Marbaix montraient en effet que l'injection de cet ARN dans les oocytes d'une grenouille, le xénope, induisait bien la synthèse d'hémoglobine de lapin.

Les années ont suivi, les lieux ont changé, les découvertes se sont multipliées. Les avancées thérapeutiques sont apparues. Les développements économiques aussi, comme en témoigne le pôle de biotechnologies à Charleroi : incubateur d'entreprise (Wallonia Biotech) et structure de valorisation (BioVallée) sont désormais en leurs murs, à côté des spin-off Henogen (60 collaborateurs), Euroscreen (80 collaborateurs dont 60 à Charleroi), ou encore Delphi Genetics, dans le prolongement-même de la source première, l'Institut de biologie et de médecine moléculaires (IBMM) où plus de 200 chercheurs, pour reprendre la formule d'Hubert Chantrenne, " tâtonnent, bricolent, tentent, échouent, poursuivent vers l'inconnu, et puis, un jour, découvrent ! ".

Maité Carlier


Le 25 avril 1953, Watson et Crick révélaient la structure en double hélice de l'ADN. Mise en perspective de cette révélation-clef avec un des précurseurs de la biologie moléculaire à l'ULB, Hubert Chantrenne.



En savoir plus ?
www.ulb.ac.be/ibmm

 
  ESPRIT LIBRE > JUIN 2003 [ n°14 ]
Université libre de Bruxelles