La pub est-elle morte le 11 septembre ?
Philippe Pellegrino nous livre, dans la foulée de ce séminaire, quelques réflexions sur son métier, ou comment faire de la
pub après le 11 septembre.
Quelles sont les conséquences du 11 septembre sur la société de consommation et ses effets en terme d'enjeux sur le monde
de la communication et de la publicité ?
Cette date restera gravée dans l'inconscient collectif et devrait déboucher, à terme, sur une modification profonde du rôle
des faiseurs d'opinion. En effet, ces événements tragiques vont confirmer une évolution profonde de l'opinion publique. "
Les gens veulent comprendre les enjeux et demandent qu'on les respecte. ". Ils sont en quête " de sens, de bon sens, d'éthique,
de responsabilité. ". En résumé, nous devrions assister au retour de l' " être ", le paraître, que l'on croyait solide et
puissant, ayant fait la preuve de sa vulnérabilité.
Créer du sens
En conséquence, le modèle tout marchand doit apprendre à créer du sens. Les marques sont appelées à modifier profondément
leur stratégie en privilégiant la responsabilité, la valeur contributive et l'éthique. Pour survivre, les marques vont devoir
créer de la valeur durable en adoptant une communication citoyenne.
Les publicitaires, dont la première vocation est de gérer les marques de leurs clients de manière stratégique, rencontrent
aujourd'hui de nouveaux enjeux. La publicité, véritable bâtisseur de mythes aux moyens financiers globalement considérables,
doit s'adapter et s'intégrer à un dispositif plus complexe, plus ambitieux et plus proche de l'objectif d'intégration sociale
de l'entreprise.
La marque est appelée à devenir multidimensionnelle, à la fois citoyenne, marchande et financière. Il ne s'agit plus de séduire
à tout prix, quitte à provoquer, mais bien de " séduire utile " et par là, de susciter l'adhésion.
Ce nécessaire processus de re-engineering des marques passe par la notion de respect du citoyen, qu'¹il faut rétablir. La
publicité est aujourd'hui face à un défi : associer la recherche d'impact et l'efficacité aux critères éthiques , concilier
la créativité et la responsabilité, l'impertinence et le sens.
Ces concepts rencontrent un écho très favorable auprès des dirigeants d'entreprises. En effet, toutes les études démontrent
que le principal actif de bilan d'une entreprise est sa marque. Les analystes ne s'y trompent pas et portent un intérêt croissant
à sa pérennité, sa vulnérabilité et son éthique.
Par ailleurs, une étude récente réalisée en France a démontré la primauté des marques à forte intégration culturelle locale.
Le sens, mais aussi la proximité et l'identification (re)deviennent discriminants. L'uniformisation mondialiste est plus que
jamais dépassée. Les marques qui ne sauront pas montrer leur appartenance à une communauté locale verront leur avenir compromis.
" Brand Academy "
Pour accompagner ces tendances nouvelles, il faut susciter et soutenir l'initiative. Ainsi, Ogilvy et l'École de Commerce
Solvay viennent de créer une " Brand Academy ", qui permettra aux étudiants et 3e cycle de se préparer à intégrer des dimensions
très complexes et d'apprendre à structurer le déploiement d'une marque. Par ailleurs, la création d'un Observatoire des Marques,
qui disposerait d'un statut particulier auprès de la Commission européenne, serait une bonne chose. Enfin, il serait souhaitable
d'encourager les entreprises à déposer un " bilan de la marque ", qui pourrait bénéficier d'avantages fiscaux dans le cas
d'une forte valeur contributive.
Face à ces nouveaux enjeux, l'avenir est à envisager avec enthousiasme. Cette prise de conscience ne pourra que revaloriser
le rôle et la place de l'industrie publicitaire au sein, notamment, des conseils de direction.
Philippe Pellegrino directeur d'Ogilvy Belgium
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Une fois par an, l'École de commercecommerce Solvay organise un atelier-débat autour d'un sujet controversé. Cette année,
elle avait choisi de " s'attaquer " à la pub. " La publicité, de la séduction à la saturation " réunissait, en avril, des
hommes dont le métier est la communication, comme Philippe Pellegrino (CEO de l'agence de communication Ogilvy Belgium), et
Christophe Segaert (Communication Director Belgacom), mais aussi des représentants de mouvements anti-pub comme et Yvan Gradis,
ancien président du RAP (Résistance à l'agression publicitaire) et actuel administrateur de " Publiphobe " ainsi que Marc
Léotard, président de RAP Belgique.
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