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Polytech sort la boîte à outils pédagogiques

Esprit Libre : L'apprentissage par projet, en Faculté des Sciences appliquées, a été lancé en septembre 2002. Comment l'aventure a-t-elle démarré ?
Philippe Bouillard : L'idée était dans l'air du temps : privilégier les méthodes d'enseignement actif. Les cinq départements de Sciences appliquées ont donc mis en place différents outils, dont les projets à réaliser sont une des facettes. Pour y arriver, nous avons créé le Bureau d'appui pédagogique de Polytech. Nous avons également modifié notre offre de cours. Par exemple, les étudiants de 1re ont à présent un cours de connaissances fondamentales qui est un cours intégré de disciplines scientifiques leur permettant d'appréhender les interactions entre les sciences. Cette réflexion et ces choix ont abouti au moment où la réforme de Bologne s'installait chez nous. Ce qui tombait plutôt bien...

Esprit Libre : l'enseignement ex-cathedra ne suffit plus...
Philippe Bouillard : L'enseignement ex-cathedra est souvent très passif. Même si il ne faut pas sous-estimer tout le dynamisme et la créativité de l'enseignant pour contextualiser son cours et le rendre attractif. En confrontant le plus vite possible nos étudiants avec de vraies questions d'ingénieurs, nous leur transmettons la méthodologie qui leur permettra de relier les cours à des applications concrètes. Si on prend l'exemple des barques en béton réalisées l'an dernier par des étudiants de 2e, on ne leur a pas expliqué le principe d'Archimède ; on leur a dit : construisez-nous une barque qui flotte. À l'étudiant de comprendre les questions et les principes (dont celui d'Archimède) qui sous-tendent le problème...
Philippe De Doncker : L'idée c'est que les étudiants s'approprient un problème, s'impliquent, ce qui va leur permettre de découvrir une démarche scientifique, tout en développant leur créativité. C'est aussi de permettre aux étudiants de 1re BA de se familiariser avec toute une série de domaines avant de choisir leur spécialisation. Autre élément important : savoir communiquer. Dès la 1re BA aujourd'hui, on leur apprend à présenter leurs résultats de façon professionnelle. Nous sommes d'ailleurs positivement étonnés de la maturité dont nos étudiants ont fait preuve en 1re pour présenter leur projet.

Esprit Libre : Quelles sont les réactions des élèves face à cette innovation ?
Philippe De Doncker : On a constaté, lors des jurys, une différence importante par rapport à l'attitude face aux TP classiques. L'enthousiasme ici était palpable. Souvent, les étudiants ont même été au-delà de ce qui était attendu d'eux. Indirectement, ce genre de projet permet aussi une meilleure intégration dans le milieu universitaire.

Esprit Libre : Est-ce que le fait de faire travailler les équipes d'étudiants sur un même projet crée une émulation, une sorte de compétition ?
Philippe Bouillard : Au sein d'un même groupe, les meilleurs tirent les autres vers le haut. Mais nous ne voulons pas introduire de compétition entre les groupes. Ils sont évalués uniquement sur la démarche scientifique. On fera, hors évaluation, une petite " compétition " entre lance-balles, pour s'amuser, le vendredi 1er juillet.

Esprit Libre : Quel est le rôle des chefs d'équipe, qui sont des étudiants de 4e ?
Philippe Bouillard : Le chef d'équipe est suivi par un superviseur académique. Il assure l'animation et la gestion de son groupe ; un travail qui est également valorisé dans son propre cursus. Il ne faudrait d'ailleurs pas croire que l'on fait de l'encadrement à peu de frais, car il s'agit là aussi d'un projet pédagogique pour l'étudiant de 4e. On a d'ailleurs observé que ces étudiants sont en général très attachés à leur groupe ; ils ont empêché beaucoup d'abandons, par exemple. Et grâce à eux, on a un contact direct avec nos étudiants.

Esprit Libre : Quelle est votre appréciation des projets développés ? Est-ce que vous avez été surpris par l'ingéniosité de certains ?
Philippe De Doncker : Techniquement, beaucoup de lance-balles se ressemblaient puisqu'une solution apparaissait évidente et simple. Mais dans certains groupes, il y a eu des trouvailles hors du commun. Et c'est assez gratifiant pour les enseignants de découvrir le potentiel de créativité développé par leurs étudiants.

Esprit Libre : Est-ce que vous avez eu des échos favorables du monde de l'industrie face à cette adaptation de l'enseignement ?
Philippe Bouillard : Très positifs. Une prochaine étape sera d'ailleurs d'associer le monde industriel (comme tuteurs, membres du jury...).

Esprit Libre : Avez-vous déjà quelques idées pour les projets de l'an prochain ?
Philippe Bouillard : Certainement. Mais cela reste encore top secret : nous ne voudrions pas que certains petits malins planchent sur la chose pendant leurs vacances (rires)...

Alain Dauchot


Coordinateur pour la Faculté de la réforme d'enseignement par projet en Sciences appliquées, Philippe Bouillard se félicite des effets positifs de cette petite révolution dans l'apprentissage du métier d'ingénieur. Avec Philippe De Doncker, 1er assistant à la Faculté, il nous parle avec enthousiasme de cette nouvelle approche et de son introduction, depuis cette année, dans le programme de 1re année.



 
  ESPRIT LIBRE > JUIN 2005 [ n°32 ]
Université libre de Bruxelles