À la croisée des chemins culturels
Si la présence de nombreuses institutions internationales ne fait que renforcer cette tendance, ces échanges culturels ne
sont cependant pas un phénomène récent mais s'inscrivent dans une longue tradition : depuis le XVIe siècle, Bruxelles bénéficie
d'une incontestable réputation sur le Continent. La situation centrale de la ville comme siège du gouvernement des anciens
Pays-Bas, la présence en ses murs des hauts fonctionnaires, de l'aristocratie et du monde de la finance, ont permis aux activités
économiques de se développer selon un modèle particulier, faisant de la ville une place commerciale animée, jouant un rôle
de premier plan dans les échanges internationaux. Les relations privilégiées qu'ont entretenues les Pays-Bas avec l'Espagne
des XVIe et XVIIe siècles, puis avec la Bavière et l'Autriche au XVIIIe siècle, à l'époque où Bruxelles remplissait une fonction
complexe de capitale-satellite, favorisèrent le cosmopolitisme, les échanges culturels et l'ouverture sur les autres pays
d'Europe.
Cosmopolitisme
C'est dans cette perspective que se développe l'un des axes de recherche interdisciplinaire du CIRHIBRU avec pour ambition
de mettre l'accent sur la dimension multiculturelle de Bruxelles sous l'Ancien Régime, en abordant le phénomène sous l'angle
de l'histoire politique, sociale et culturelle. Les premiers résultats de ces investigations permettent de reconsidérer la
place de la cité dans un réseau de circulation des personnes et des idées à l'échelle européenne. Ils reposent en d'autres
termes l'importance relative de la ville, perçue dans sa dimension de capitale avant la lettre, située à la croisée des chemins
empruntés par les voyageurs, à l'intersection des cultures latine et germanique... Un premier projet de recherche mini-arc
a donc été axé sur le cosmopolitisme dans la capitale des Pays-Bas autrichiens au XVIIIe siècle.
Un prince mécène
Les recherches récentes ont par ailleurs montré l'intérêt de la période charnière que forment les années 1700. Elles correspondent
à un tournant dans l'histoire de la cité : au coeur des conflits militaires - la ville a été fortement endommagée par le bombardement
de 1695 -, la capitale des Pays-Bas espagnols bascule dans l'orbite de la France avant de passer sous l'autorité anglo-batave,
dans le contexte troublé de la guerre de Succession d'Espagne. Mais il est très intéressant de constater que cette période
agitée au plan politique n'empêche pas un prince brillant, Maximilien-Emmanuel, d'animer une véritable vie de cour à Bruxelles.
Exceptionnel bâtisseur et grand amateur de spectacles, il permet à nombre d'auteurs, de comédiens, de peintres, d'architectes
et de danseurs de trouver à Bruxelles des débouchés professionnels intéressants. L'étude du mécénat de ce prince est au coeur
du deuxième projet mini-arc mené au sein du CIRHIBRU.
Parmi les institutions créées par ce gouverneur, la Monnaie tient, depuis trois siècles, une place essentielle non seulement
dans la vie culturelle, mais également économique et sociale. Élevé en 1700, dans le bas de la ville et hors du centre traditionnel,
ce théâtre est l'une des pièces maîtresses du nouveau plan urbanistique de la ville, entraînant dans son sillage le développement
de nombreuses activités telles que hôtels, commerces de luxe, débits de boisson... Au plan européen, la Monnaie se singularise
à la fois par sa multiculturalité - on y joue et on y chante en français, en flamand ou en italien - et par son rôle de plaque
tournante entre les domaines germanique et roman. Ces spécificités ont déjà été mises en lumière dans trois ouvrages dirigés
par des chercheurs de l'ULB. Un quatrième, consacré à La Monnaie symboliste sort de presse dans les prochaines semaines.
Manuel Couvreur Chercheur FNRS et Maître de conférences
Michèle Galand Chef de travaux
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Bruxelles est aujourd'hui un véritable pôle européen sur le plan culturel, artistique et scientifique. Des créateurs, des
artistes, des chercheurs de l'Europe entière y convergent et viennent y présenter le fruit de leurs expériences.
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