Études supérieures : objectif Bologne
Esprit Libre : La prochaine réunion du Conseil des ministres de l'enseignement supérieur au niveau européen est fixée à Berlin, en ce mois
de septembre. Quel est l'ordre du jour ?
Françoise Dupuis : Nous aurons à nous pencher sur les problèmes de qualité, de mobilité sociale des étudiants et des enseignants, ce dernier
point étant extrêmement important. Bologne fait son chemin, ici comme ailleurs, et nous aurons à comparer les démarches que
nous avons effectuées dans les différents pays.
Esprit Libre : Le décret établissant les acquis du processus de Bologne dans notre enseignement supérieur en Communauté française est prévu
pour bientôt... Que va-t-il préciser ?
Françoise Dupuis : Il va définir à quel niveau nous allons classer nos diplômes par rapport à cette espèce de grand système à tiroirs qu'est
le 3-5-8, de façon à pouvoir comparer plus facilement, à se déplacer plus facilement et à amplifier nos échanges au niveau
européen. Le décret contiendra aussi une réécriture des différentes qualifications. Il précisera les objectifs et les missions
de l'enseignement supérieur à la lumière des récentes évolutions, l'organisation des dispositions européennes comme les ECTS,
ainsi que des indications sur la manière dont les universités pourront organiser les synergies. In fine, il y a enfin ce que
l'université peut et doit offrir en matière d'enseignement à distance, de formation continuée, de recyclage, etc.
Esprit Libre : C'est entre 85 et 88 que l'Europe a mis en avant l'enseignement comme ciment européen. L'Europe du savoir : un processus particulièrement
lent à mettre en place ?
Françoise Dupuis : C'est une très bonne question. Oui et non. C'est d'abord un processus qui n'a jamais cessé depuis le Moyen Âge, époque où
les chercheurs et savants circulaient en Europe, bien plus que le reste. La déclaration de Bologne a comme objectif avoué,
me semble-t-il, de construire une Europe du savoir qui est un pendant à l'Europe économique. On ne peut pas construire une
Europe du savoir qui serait exclusivement inféodée à l'Europe économique. Cela correspond à nos options ouvertes concernant
l'enseignement supérieur : une école de très haut niveau, de formation humaniste, à côté des compétences pointues que l'on
y donne.
Esprit Libre : Comment faire en sorte que la mobilité puisse être pratiquée par tous ?
Françoise Dupuis : Ce sera un des gros enjeux de Berlin. Cette question a été soulevée par les organisations étudiantes, à juste titre. Nous
avons actuellement en Communauté française un très grand nombre d'accords bilatéraux d'échanges d'étudiants. Mais il est vrai
que les bourses que nous fournissons pour permettre ces échanges sont de loin insuffisantes. Grâce à un petit refinancement
de la Communauté française, j'ai pu augmenter légèrement notre contribution. Nous devons aider les jeunes qui n'ont pas les
moyens de le faire à décrocher ces bourses pour ne pas recréer des dualités. Aujourd'hui, ce sont essentiellement les départements
des ingénieurs, de Science économique qui bougent. Il nous faut élargir tout cela.
Esprit Libre : Le Conseil interuniversitaire de la Communauté française (CIUF) a été créé il y a maintenant plus de vingt ans. Il a pour
mission d'organiser une concertation entre les différentes institutions universitaires de la Communauté. En quoi a-t-il récemment
évolué dans ses missions et son organisation ?
Françoise Dupuis : Au départ, le CIUF associait toutes les composantes de ce qu'on peut maintenant appeler la communauté éducative des universités
: les étudiants, les enseignants, les autorités, les syndicats, et d'autres membres extérieurs. Cela devait être un lieu où
l'on pouvait élargir les discussions. Cependant, je pense qu'un certain nombre de partenaires du CIUF se sentaient un tout
petit peu négligés. Nous avons réfléchi à deux choses. D'une part, qu'il y avait, bon gré, mal gré, des réformes à prévoir.
Notamment le dossier Bologne. Il fallait donc chercher un lieu où le débat pouvait être amené sérieusement. D'autre part,
j'ai été amenée assez vite à concevoir la mise en place d'un Conseil de politique scientifique pour la Communauté française.
S'il y a beaucoup de conseils de politique scientifique en Belgique, il n'y en avait pas dont l'objectif premier est de s'occuper
de recherche fondamentale en Communauté française. Il fallait dès lors le créer.
Nous avons recentré les prérogatives du CIUF sur les missions d'enseignement et de service à la société, globalement de l'insertion
de l'université dans la société, etc. C'est à la fois pour raviver le débat dans la communauté éducative et pour mieux cibler
les problèmes, notamment d'enseignement, dans les universités.
Alain Dauchot
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Les universités sont à un moment-charnière. Impliquées dans un processus de modernisation depuis 1999 - date de la signature,
par 29 ministres européens de l'Enseignement supérieur, de la Déclaration de Bologne - elles réorganisent leur enseignement
dans la perspective d'une harmonisation qui devrait être finalisée en 2010. Pour faire le point, nous avons rencontré Françoise
Dupuis, ministre de l'Enseignement supérieur en Communauté française.
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