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[à l'université]
 
 
 
Les femmes, l'Université, les professions scientifiques et l'accès à l'emploi

Malgré la meilleure réussite des filles à l'école, l'infériorisation des femmes dans l'emploi persiste. Mais même si les filles ne tirent pas tous les avantages professionnels de leurs succès scolaires et si le poids des structures familiales pèse sur leur vie professionnelle, l'accès des femmes aux emplois d'encadrement et de responsabilité est devenu un fait important. C'est ce que démontre la deuxième phase de l'étude Newtonia.

Pas plus que les emplois d'exécution, les emplois universitaires ne sont à l'abri des approches " viriles " qui dominent les représentations du travail et contribuent à inférioriser les femmes. La situation des femmes universitaires dans les entreprises est cependant bien différente de celle des femmes qui se trouvent dans des positions dominées. Leur présence dans les emplois d'encadrement ne suscite sans doute plus les oppositions et les réticences qu'avaient rencontrées les générations précédentes et leurs trajectoires professionnelles et familiales ressemblent à beaucoup d'égards à celles de leurs collègues masculins.

Constats positifs...

Au terme de notre enquête, deux constats s'imposent : d'une part, les femmes ne sont plus marginales mais sont très largement présentes dans les emplois universitaires, y compris dans les professions scientifiques et techniques ; d'autre part, contrairement aux assertions courantes, on ne peut parler de " désaffection " à l'égard des filières scientifiques et techniques.

Des verrous ont donc bien sauté pour les générations des femmes diplômées universitaires d'après 1970.

...et obstacles

Mais des obstacles demeurent. Dans leur carrière professionnelle, les femmes continuent à se heurter à un " plafond de verre ", même s'il s'est déplacé vers le haut. Et les inégalités dans la répartition des charges familiales conduisent à faire peser différemment sur les femmes et sur les hommes les contraintes de la vie professionnelle, et à fragiliser les carrières féminines.

Ainsi, alors que les professions scientifiques et techniques sont désormais largement ouvertes aux femmes, les normes implicites qui délimitent les secteurs à domination masculine continuent à faire des carrières féminines un parcours d'obstacles.

Femmes et recherche privée

L'étude réalisée par le DULBEA-ETE met quant à elle en évidence la sous-représentation des femmes dans la recherche industrielle, et ce malgré le fait que le secteur industriel soit extrêmement actif, aussi bien en termes de financement que d'emplois alloués à la R et D. Cette sous-représentation s'accentue au fur et à mesure que l'on gravit les échelons de la hiérarchie. De plus, par rapport aux hommes, elles travaillent plus sous contrat temporaire, ont généralement une ancienneté moins importante et sont moins bien payées à qualifications égales. Ceci démontre que les politiques actuelles de promotion de la recherche industrielle ne sont pas suffisantes pour atteindre l'égalité femmes-hommes.

La sous-représentation des femmes s'explique par plusieurs facteurs tels que la présence de barrières à l'entrée (manque d'information sur les opportunités de carrières et sur les différentes professions dans le secteur de la science et de la technologie, présence de nombreux stéréotypes et de pratiques de recrutement discriminantes) ou encore par l'existence d'une atmosphère pesante, étant donné qu'elles évoluent dans un milieu avec des valeurs et des critères mis en place par des hommes et pour des hommes. Ceci entraîne des problèmes d'isolation et de discrimination. De plus, pour les femmes, travailler dans la recherche industrielle rend difficile la combinaison vie professionnelle et vie familiale.

En partant de ces faits et en menant une étude de cas, cette recherche a permis de mettre en avant toute une série de recommandations et de bonnes pratiques qui pourraient mener à une meilleure représentation des femmes dans la recherche privée, une meilleure articulation de la vie professionnelle et familiale ou encore une meilleure atmosphère de travail.

Une meilleure intégration des femmes dans la recherche privée ne peut être que bénéfique à tout point de vue. En effet, ces dernières ayant des qualités différentes de celles des hommes, elles peuvent accroître la diversité, changer les modes de communication, apporter un plus au processus d'innovation ; en bref, accroître la compétitivité du secteur. Une collaboration entre les gouvernements, les firmes et les réseaux devrait permettre d'arriver plus vite à une parité et une égalité des femmes et des hommes dans la recherche privée.

 
Les équipes du TEF-Fac des Sciences ULB et de DULBEA-ETE

Un colloque était organisé fin octobre par le Centre de sociologie travail, emploi, formation (TEF)-ULB, le DULBEA-ETE et la Faculté des sciences de l'ULB. Son titre : " Les femmes et les professions scientifiques : les femmes dans la recherche, diplômes universitaires et accès à l'emploi ". À cette occasion étaient présentés les résultats de deux études : d'une part " Women in industrial research ", réalisée par le DULBEA-ETE, et d'autre part " Les femmes et les professions scientifiques " (2e phase de la recherche Newtonia), réalisée par le TEF-ULB et la Faculté des sciences de l'ULB.



Vient de paraître :
Les femmes et les professions scientifiques. Diplômes universitaires et accès à l'emploi, Mateo Alaluf et al., Éditions de l'Université de Bruxelles, 2004.

 
  ESPRIT LIBRE > NOVEMBRE 2004 [ n°26 ]
Université libre de Bruxelles