Livres fatigués, la Digithèque prend le relais
" La mutation numérique est irréversible et ses progrès rapides ; elle nous donne des moyens technologiques inégalés pour
la diffusion des savoirs. Qu'en ferons-nous ? " Débattue lors du récent colloque intitulé " De Gutenberg au numérique : une
révolution en marche dans l'édition et la diffusion du livre " , cette question a trouvé réponse à la Digithèque de l'ULB.
Suite à l'acquisition d'un scanner de livres à balayage, baptisé Digibook, en février 2004, les Bibliothèques ont engagé un
programme de digitalisation d'ouvrages de leurs collections, programme qui accorde la priorité aux livres dégradés ou qui
ne sont plus édités mais qui sont encore consultés fréquemment et/ou qui présentent une grande valeur intellectuelle.
Tout a commencé avec un problème que rencontrent toutes les bibliothèques, celui de voir des ouvrages très abîmés se dégrader
de plus en plus. L'épopée de la numérisation a donc débuté avec les Annales chronologiques, littéraires et historiques de
la maçonnerie des Pays-Bas, d'Auguste de Wargny. Au préalable, un groupe de réflexion animé par Cécile Gass a envisagé les
aspects techniques de la numérisation avec le Digibook. " De nombreuses questions se posaient quant au stockage, à la taille,
au format des documents digitalisés... et il fallait tester les possibilités de la machine, " se souvient-elle.
Des livres libres
À ce stade ont également été définies les conditions d'utilisation des oeuvres. La Digithèque s'est évidemment souciée des
enjeux découlant de la mutation numérique auxquels le monde du livre est confronté : enjeu juridique d'une part, avec la question
des droits d'auteurs, et enjeu économique d'autre part, avec la question de la gratuité sur Internet. Alors que le lancement
du service " Google Recherche de livres " a soulevé de nombreuses questions sur les droits des auteurs et des éditeurs, et
la propriété intellectuelle, la Digithèque s'inscrit dans une toute autre démarche : elle s'est d'abord attaquée à la numérisation
d'ouvrages libres de droit, et entend bien négocier une licence pour les livres qui ne sont pas encore tombés dans le domaine
public. Les auteurs ne sont donc pas lésés. Les éditeurs non plus puisque les livres en question ont déjà été acquis par les
Bibliothèques et dans certains cas, ne sont même plus édités. Via le catalogue CIBLE des Bibliothèques de l'ULB, la Digithèque
permet donc aux cyber-lecteurs d'accéder aux contenus tout en préservant les originaux. De plus, dans un souci de libre accès
aux connaissances, chaque copie peut être consultée gratuitement.
Page à page
Mais avant d'être mis en ligne, chaque ouvrage doit passer " entre les mains " du Digibook. Comment fonctionne-t-il ? Une
caméra, associée à un puissant système d'éclairage, " balaie " l'ouvrage posé en équilibre sur deux plateaux ; quatre pages
sont ainsi numérisées à chaque aller-retour de la caméra, soit une moyenne de 300 par heure. Il s'agit d'un travail de longue
haleine puisque 300 pages scannées requièrent 5 à 6 heures de traitement informatique pour finaliser un livre numérique :
cadrage, luminosité, binarisation en noir et blanc... Quelque 13 600 pages ont ainsi été digitalisées, soit 129 oeuvres -
d'un document de quelques pages à un ouvrage en plusieurs volumes comme par exemple L'Art moderne actuellement en cours de
numérisation -, depuis sa mise en route à l'ULB. Tous les mois, près de 1000 pages sont ainsi digitalisées et publiées sur
le Web.
Pirenne numérisé
Le principal problème auquel la Digithèque est confrontée est le manque de coordination de la numérisation à l'échelle nationale.
" On en est encore aux balbutiements, témoigne Françoise Vandooren, attaché à la direction des Bibliothèques. En raison des
différents niveaux institutionnels, la situation est très compliquée : le budget est éclaté et il est difficile de savoir
qui numérise quoi ". Au sein de l'Union européenne, le projet de Bibliothèque numérique européenne - lancé en réponse à "
Google Recherche de livres " qui donne essentiellement accès à des ouvrages anglophones, tendant à une hégémonie que l'Europe
s'est empressée de contrer - devrait pousser les universités et bibliothèques actives dans la digitalisation d'oeuvres papier
à collaborer davantage.
En attendant la concrétisation de ce souhait, la Digithèque compte de nombreux projets tels que la mise en valeur, en collaboration
avec les Archives et la Réserve précieuse, du patrimoine de l'ULB, de son Histoire et des personnalités liées à l'Université
telles que l'historien Henri Pirenne dont l'oeuvre est actuellement en cours de numérisation ; la digitalisation d'ouvrages
rares et précieux, la mise en ligne de livres récemment publiés par les Éditions de l'Université et qui sont épuisés, l'océrisation
qui devrait permettre de faire des recherches par mot dans un livre... Le Digibook a donc encore devant lui des millions d'allers-retours
qui mèneront de nombreux ouvrages à l'immortalité.
Amélie Dogot
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Il y a un an, la Digithèque mettait ses premières copies numériques d'ouvrages gratuitement à disposition sur le Web via le
catalogue en ligne des Bibliothèques. Forte de 129 oeuvres écrites, la Digithèque n'entend pas détrôner le livre imprimé :
elle se propose de favoriser sa pérennité grâce à la numérisation, permettant de la sorte à quiconque d'accéder gratuitement
et à distance à des sources précieuses, épuisées ou en voie de disparition.
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Plus d'infos ? http://digitheque.ulb.ac.be
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