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Doyen de la Faculté de Pharmacie, Pierre Van Antwerpen est aussi chercheur à l’Unité de recherche Pharmacognosie, Bioanalyse et Médicaments. Il étudie l’enzyme myeloperoxidase et particulièrement son exploitation thérapeutique. Ses recherches portent également sur les méthodes de validation et de détection de composés chimiques et biologiques. Il est aussi responsable de la plateforme analytique de la Faculté de Pharmacie, regroupant de nombreux équipements d’analyse et de formulation utiles aux chercheurs.


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Juillet 2017 – Oeufs contaminés au fipronil

Pierre Van Antwerpen, Unité de recherche Pharmacognosie, Bioanalyse et Médicaments


Pierre Van Antwerpen, comment un produit toxique comme le fipronil a-t-il pu se retrouver dans la chaîne alimentaire?

Il s’agit d’une utilisation frauduleuse du produit: le fipronil est un antiparasitaire autorisé pour traiter ponctuellement les animaux domestiques comme les chats, les chiens,… Ici, il semblerait que le fipronil ait été mélangé avec un autre antiparasitaire –le "DEGA-16", autorisé celui-là– destiné à traiter les poules contre les poux rouges. Il n’était donc pas censé se retrouver dans la chaîne alimentaire.


L’AFSCA aurait-elle pu détecter plus tôt cette contamination?

Je ne pense pas, car il n’y avait aucune raison de penser que le fipronil pourrait se retrouver à un endroit où il n’était pas censé être. Il est aujourd'hui impossible, avec les techniques de détection actuelles, de screener tous les composés chimiques suspects d’un seul coup: il faut un soupçon ou une motivation initiale pour lancer une analyse de détection sur un composé précis, selon un protocole précis. On ne peut pas trouver ce que l’on ne cherche pas. C’est une des limitations des méthodes analytiques: on doit focaliser sur une molécule –ou une famille de molécules– à la fois. On ne peut donc pas contrôler tout, tout le temps.


Détection du composé en juin, communication au public en août: l’AFSCA aurait-elle dû communiquer plus tôt?

Je pense qu’il a d’abord fallu du temps pour confirmer l’information. Il y avait deux analyses contradictoires pour le même échantillon, il a donc fallu vérifier. Puis il fallait retrouver le lot de DEGA-16 contaminé, les élevages qui ont utilisé ce produit, etc. Il faut dire aussi que le risque de toxicité aiguë du fipronil chez l’homme est limité: il n’y avait pas de problème immédiat de santé publique. S’il s’agissait d’un produit très nocif, l’AFSCA aurait probablement réagi différemment et de manière plus drastique.


Doit-on s’attendre à d’autres révélations ou scandales similaires concernant notre alimentation?

Tant qu’il y aura un nombre si élevé de produits chimiques différents utilisés dans le secteur alimentaire, il y aura un risque. Sans compter les usages frauduleux qu’on ne peut pas prévoir, comme ce fut le cas ici. Il y a aussi des contaminations fortuites: la contamination des œufs bio aux PCB en octobre en est un bon exemple. Ce sont en effet des produits qui ont une longue durée de vie et sont persistants dans l’environnement: on les retrouve plus facilement dans l’eau ou dans la terre. Il n’y a pas de raison, par ailleurs, que le "bio" soit épargné par des contaminations frauduleuses non plus. La seule solution serait de diminuer le nombre de produits disponibles sur le marché, ce qui rendrait un screening systématique plus facile à mettre en oeuvre. L’autre solution est de diminuer l’usage de ces produits, ce qui revient à changer notre mode de consommation.


Était-on dans une situation comparable à la crise de la dioxine dans les années 90?

C’est comparable dans le sens qu'il s'agissait aussi d'un composé qui avait été introduit illicitement dans les farines de nourrissage pour les animaux. L’ampleur était cependant beaucoup plus élevée que pour le fipronil car beaucoup plus d’exploitations étaient concernées. La détection de la dioxine dans les produits alimentaires est désormais devenue un contrôle courant. Concernant le fipronil, ce ne sera probablement pas le cas, car le fabricant BASF a annoncé qu’il ne demanderait pas le renouvellement de son autorisation européenne de mise sur le marché. L’usage va donc diminuer et le risque presque disparaître pour les produits européens.

Rappelez-vous

Jeudi 20 juillet

L’AFSCA lance une alerte européenne concernant la contamination d’œufs par le fipronil, un produit antiparasitaire interdit dans la chaîne alimentaire.

L’Agence a détecté le produit début juin mais l’information ne sera communiquée au public que début août.

26 pays européens et 19 pays tiers sont concernés par cette contamination, originaire de Belgique ou des Pays-Bas. Les pertes sont estimées à 21 millions d’euros dans notre pays.

En octobre, ce sont certains lots d’oeufs "bio" qui sont retirés du marché: on y a retrouvé des traces de PCB.