fermerclose

Professeur à la Faculté Solvay Brussels School of Economics and Management, chercheur au centre ECARES – European Centre for Advanced Research in Economics and Statistics – et au centre européen Bruegel, André Sapirb étudie l’économie internationale et l’intégration européenne.

Expert reconnu internationalement, il a été, de 2001 à 2004, conseiller économique du Président de la Commission européenne, Romano Prodi.


andre.sapir@ulb.ac.be

fermer la fenêtre
English version
Retour aux 12 mois, 12 experts




Experts pour la presse:

Cliquez ici et découvrez des experts de l'ULB, à propos de l'économie européenne et la Grèce.

Tous les experts pour les 12 événements de l'année

Juillet 2015 - Grèce: l'euro à l'épreuve

André Sapir, European Centre for Advanced Research in Economics and Statistics - ECARES


André Sapir, la crise grecque a-t-elle été un révélateur pour l’Union européenne?

Oui car la Grèce a été le premier pays à être touché par la crise de la zone euro et celui où la tentative de solution à la crise a été la moins satisfaisante. Les autres pays de la zone euro atteints par la crise et qui ont dû faire appel à l’aide internationale - l’Irlande, le Portugal, l’Espagne et Chypre - s’en sont beaucoup mieux tirés, même si des problèmes importants demeurent encore aujourd’hui. Personne n’avait vraiment imaginé qu’un pays de la zone euro puisse être confronté à une crise de la dette souveraine, c’est-à-dire que l’État soit incapable de rembourser sa dette. On a tous à l’esprit les crises de la dette en Amérique latine et en Asie dans les années ’80 et ’90 et d’autres plus récentes, mais aucun pays avancé n’avait connu une telle situation depuis plus de 50 ans! Et parce qu’elle n’avait pas anticipé la possibilité d’une telle crise, l’Europe s’est trouvée désarmée intellectuellement et institutionnellement lorsque la crise grecque a débuté à la fin 2009, il y déjà 6 ans. Dans ce sens, la crise grecque a donc bel et bien été révélatrice d’une gouvernance européenne insuffisante.


L’Europe a tout de même fini par réagir?

Oui, mais il lui a fallu du temps pour briser le cercle vicieux dans lequel se sont retrouvés plusieurs pays de la zone euro où la fragilité du système financier a fragilisé les finances publiques, et où la fragilité des finances publiques a en même temps fragilisé le système financier. Il a fallu d’abord mettre en place un mécanisme européen de stabilité pour aider les États. Il a fallu ensuite créer la fameuse " union bancaire" et confier la responsabilité pour la stabilité bancaire à des institutions européennes comme la Banque centrale européenne (BCE). Ce n’est qu’alors que Mario Draghi, le président de la BCE, a pu déclarer que la BCE ferait tout ce qui était en son pouvoir pour préserver l’euro et mettre fin à la crise de confiance de la zone euro, déclenchée par la crise grecque mais qui s’était ensuite propagée à une bonne partie du reste de la zone.


Plusieurs observateurs ont pointé les mensonges de la Grèce lorsqu’elle a rejoint la zone euro, en 2001…

En effet, tout pays candidat à l’entrée dans la zone euro est sensé avoir une dette inférieure à 60% du PIB ou du moins faire des efforts jugés suffisants pour s’en rapprocher. Or la Grèce non seulement dépassait largement ce niveau, mais elle a surtout menti aux autorités européennes sur son véritable niveau d’endettement public dès son entrée dans la zone en 2001. Pire, elle a ensuite continué de trafiquer ses comptes et il a fallu attendre 2009, c’est-à-dire en pleine récession de l’économie mondiale, pour se rendre compte de l’ampleur du problème. Le fait que la crise de la zone euro a commencé dans un pays qui avait accumulé une dette publique immense et qui avait triché sur ses comptes a été lourd de conséquences sur la lecture que certains - en particulier en Allemagne - ont fait sur les causes de la crise de la zone euro et donc sur les remèdes nécessaires pour la surmonter. Tout n’est pas de la faute de la Grèce et de ses turpitudes!


Vous croyez à l’effacement de la dette grecque?

Un effacement de la dette grecque sans des réformes profondes du pays ne servirait à rien. Mais, en même temps, il faut reconnaître que le poids de la dette empêche une sortie de crise et une reprise de l’activité économique en Grèce. Il faudra donc rapidement trouver entre la Grèce et ses partenaires européens le bon équilibre entre solidarité de l’Europe et responsabilité de la Grèce sur son avenir au sein de la zone euro. La solidarité doit signifier non seulement un prêt mais aussi un allègement du fardeau de la dette. Pour sa part, la Grèce doit utiliser cette crise comme une opportunité de se réformer en profondeur. Elle est déjà à son 3e plan d’aide en 6 ans, il n’y en aura pas de 4e!

Rappelez-vous

Juin, juillet, août...

L’été fut chaud en Grèce!

Refus des créanciers de prolonger leur aide au-delà du 30 juin; bras de fer avec le Premier Ministre Alexis Tsipras qui soumet le plan de soutien à un référendum national; fermeture des banques grecques; menaces de quitter la zone euro…

La crise met aussi en lumière des divergences de vues entre Europe du Nord et Europe du Sud. La Grèce obtient à l’arraché un 3e plan d’aide.

Fin d’un chapitre mais pas de l’histoire…